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lundi 24 août 2020

RUSIA SI EXTREMA DREAPTA OCCIDENTALA (2017)



Russia and the Western Far Right (Routledge Studies in Fascism and the Far Right), 1st Edition
by Anton Shekhovtsov (Author), Publisher: Routledge; 1 edition (September 19, 2017)

LA RUSSIE ET L’EXTRÊME-DROITE EUROPÉENNE : UN CHOIX PAR DÉFAUT

Marie-Thérèse Straggiotti
Publié le 15 novembre 2017

Les formations d’extrême-droite en Europe sont utilisées par le pouvoir russe pour saper les fondements de la démocratie libérale. Chercheur à l’Institue for Euro-Atlantic Cooperation, Anton Shekhovtsov a publié un livre intitulé Russia and the Western Far Right. Tango noir (éd. Routledge). Il a présenté ses analyses à l’ECFR de Paris (European Council on Foreign Relations) au cours d’un débat avec Thorniké Gordadzé, ancien ministre de Géorgie, conseiller auprès de l’Institut des hautes études de la défense nationale.
La Russie et l’extrême-droite sont à la recherche d’une légitimité réciproque mais c’est un second choix. Vladimir Poutine préférerait s’allier avec des partis "convenables".

KATEHON.com 2016


Heinz-Christian Strache, président du FPÖ autrichien, et Vladimir Poutine


Légitimation mutuelle ? Oui, mais… davantage. Les caisses de résonance, comme on disait autrefois, offertes par les partis d’extrême-droite à l’argumentation de la politique russe, notamment de sa politique étrangère, sont certainement très utiles pour asseoir un soft-power russe, et même pour rendre cette politique populaire. Au Moyen-Orient en particulier Moscou a besoin de montrer que la Russie n’est pas isolée, que loin d’être marginale elle participe à la construction de la paix. Pour le faire elle a besoin de commentateurs occidentaux.
La légitimation de l’extrême droite dans les pays européens par le soutien de la Russie est peut-être moins directe. Elle passe d’abord par de communes oppositions.
L’anticommunisme historique de la droite – encore qu’il n’ait plus lieu d’être s’agissant de la Russie où seul Zyouganov est encore communiste – se fond dans des « contre » toujours d’actualité : on est contre l’Amérique (même avec Trump, ça ne passe pas, l’anti-américanisme dans certains partis est parfois indestructible), contre l’OTAN naturellement, et surtout contre "l’establishment". Et Poutine depuis toujours est contre l’internationalisme
Mais alors pourquoi seulement l’extrême droite semble-t-elle concernée ? Lors des élections présidentielles françaises, trois des quatre candidats retenus après le premier tour étaient des amis de la Russie, l’un à droite (François Fillon), l’autre à l’extrême droite (Marine Le Pen) et le troisième à l’extrême gauche (Jean-Luc Mélenchon).

Une idéologie flexible
Mélenchon, pour les Russes, ce n’est pas intéressant (Combien de divisions ?) Ce n’est pas une question d’idéologie. L’idéologie, chez Poutine, est un instrument flexible. Les « acteurs » russes sur la scène internationale, et même dans le pays, ont besoin d’un support. On y met ce qu’il faut, avec l’aide de l’idéologue en chef, Alexandre Douguine, et de quelques autres philosophes ou politiciens appelés à la rescousse quand c’est nécessaire ; ça n’a pas d’importance, on met ce qu’il faut.
Les partis d’extrême-droite ont besoin d’un modèle alternatif par rapport au main stream, ils ont besoin d’une référence. On leur donne un «  patriotic sovereign state  », qui en plus défend les valeurs de la civilisation chrétienne occidentale.
Les gens des partis de la droite extrême ne connaissent rien à la Russie, et c’est tant mieux. On dit aussi que ces partis sont soutenus davantage par des entreprises petites ou moyennes que par les très grandes, et que pour elles le marché russe n’est pas sans attrait. Cela pourrait jouer un rôle dans l’Italie du Nord par exemple, pour les partisans de la Ligue.
Il y a un autre modèle, concurrent, internationaliste, mondialiste, globalisateur : la Chine est taboue dans le langage du pouvoir russe. On se complimente mutuellement sur sa force et son attractivité, et on s’en tient là.

Lors de l’élection présidentielle française, le candidat de la droite ami de la Russie a disparu rapidement de la scène politique, mis en cause personnellement. Sinon, il eut parfaitement fait l’affaire des Russes : ce n’est pas un choix délibéré pour eux que celui des extrêmes-droites, c’est plutôt un choix par défaut. Ils essaient cependant de s’attirer les bonnes grâces de partis ou de personnalités établis, en Allemagne avec Gerhard Schröder, en Autriche où ils préféreraient des liens avec les conservateurs plutôt qu’avec les populistes, mais ça ne marche pas toujours. Le FPÖ, qui devrait faire partie de la prochaine coalition à Vienne a passé un accord avec Russie unie, le parti officiel de Vladilir Poutine. Il n’y a pas de discussion de fond sur l’idéologie, explique Anton Shekhovtsov : un islamiste pro-régime est bon, un islamiste opposant est mauvais.

Le rôle de la corruption
Il faut simplement réorganiser l’approche. Si on parle de la corruption, un thème tout de même discriminant lors des élections en Russie ou en Ukraine, et bien sûr en Géorgie, le message russe est ambigu, explique Thornike Gordadze : 1) la corruption, c’est mal et on la combat ; 2) il est impossible d’éradiquer la corruption — c’est une disposition "culturelle" ; 3) on ne peut que la « discipliner », on la rend civilisée et acceptable (on tue moins, etc.) La Géorgie a tenté de lutter contre la corruption. Oui, mais c’est plus facile dans un petit pays et ça ne signifie rien pour un grand pays comme la Russie.
Et ce qui importe désormais, ce n’est pas la corruption mais la « loyauté » ; la corruption n’a plus d’importance pourvu qu’on soit loyal envers le pouvoir. Elle sert aussi à s’attirer le soutien des formations d’extrême-droite européennes à la recherche de financement que leur refusent parfois les banques nationales. On l’a vu avec le Front national qui a contracté des emprunts auprès d’une filiale d’une banque russe établie en République tchèque.
Le seul vrai souci de Vladimir Poutine, dit Anton Shekhovtsov, c’est de protéger le régime, pas l’Etat, mais le système.

Quand l’extrême droite européenne copine avec le Kremlin


Par : Marion Candau | EURACTIV.fr 16 nov. 2017 (mis à jour:  21 nov. 2017) https://www.euractiv.fr/section/l-europe-dans-le-monde/news/quand-lextreme-droite-europeenne-copine-avec-le-kremlin/



Marine Le Pen lors de sa visite au Kremlin le 24 mars 2017. [@EPA/MICHAEL KLIMENTYEV/SPUTNIK/KREMLIN / POOL MANDATORY CRE]

     Front national en France, Ligue du Nord en Italie, ou FPÖ en Autriche, les partis d’extrême droite en Europe bénéficient largement du soutien de Vladimir Poutine. Et vice et versa.

Les partis du groupe Europe des nations et des libertés du Parlement européen ont une fâcheuse tendance à aller chercher du soutien auprès du Kremlin. Quant à Vladimir Poutine, trouver un allié chez les dirigeants des partis traditionnels en Europe relève d’un véritable casse-tête. À défaut, il se tourne donc vers les partis qui l’aideront à déstabiliser l’UE.

« Les partis d’extrême droite n’ont pas été créés par la Russie, mais ils entretiennent avec elle de fortes affinités idéologiques », assure Fredrik Wesslau, de l’European Council on Foreign Relations (ECFR), lors d’une conférence sur le sujet à Paris, le 14 novembre.

En effet la montée du populisme en Europe depuis quelques années n’est pas le résultat d’une manœuvre politique de Vladimir Poutine, mais ce dernier sait comment en tirer profit.

« Cette coopération est utile au Kremlin pour légitimer ses politiques à l’intérieur du pays, pour montrer que la Russie n’est pas isolée, pour dire ‘regardez, beaucoup d’Européens adhèrent à nos idées’ », explique quant à lui Anton Shekhovtsov, chercheur à l’Institut des sciences humaines à Vienne et auteur de Russia and the Western Far Right : Tango Noir.

L’exemple du FN

Ainsi, en 2014, Médiapart révélait que le Front national avait obtenu un prêt de 9 millions d’euros par une banque russe, la First Czech-Russian Bank (FCRB). En soi, rien d’illégal. Marine Le Pen s’était d’ailleurs justifiée en disant que les banques françaises n’avaient pas voulu lui accorder de prêts ; et qu’il avait donc bien fallu aller chercher l’argent ailleurs.

Le scandale a tout de même débouché sur une résolution européenne, adoptée le 10 juin 2015 pour demander la réglementation de l’aide financière, politique ou technique fournie par la Russie à des partis politiques européens.

Une décision qui n’a pas empêché Marine Le Pen de s’afficher aux côtés de Vladimir Poutine en mars 2017, un mois jour pour jour avant le premier tour de l’élection présidentielle française. La relation entre le Front national et la Russie n’est donc pas seulement financière. À l’époque, le président russe comptait d’ailleurs sur la promesse de Marine Le Pen de reconnaître l’annexion de la Crimée si elle accède à l’Élysée.

Kiev dénonce la visite d'un eurodéputé tchèque en Crimée
L’Ukraine a dénoncé le voyage programmé de Miroslaw Ransdorf, eurodéputé tchèque, en Crimée le 19 juin. Cette visite « discrédite » le Parlement européen selon l’ambassadeur. La Commission estime que les autorités nationales doivent agir lorsque les sanctions de l’UE visant le territoire russe sont transgressées.

Au moment du référendum en Crimée en 2014, une ONG belge pro-russe, l’Observatoire eurasien pour la démocratie et les élections (OEDE), a pour sa part invité plusieurs partis d’extrême droite européens en qualité d’observateurs. Officiellement, le FN et FPÖ autrichien ont décliné l’invitation, mais Aymeric Chauprade, alors conseiller de Marine Le Pen pour les questions internationales, faisait bien partie des « experts » internationaux présents lors du référendum.

Quelques mois plus tard, un eurodéputé frontiste, Jean-Luc Schaffhauser, se rend cette fois dans le Donbass pour jouer le même rôle lors des « élections » organisées par les séparatistes pro-russes de cette région d’Ukraine, rapportait alors Le Monde.

Quête mutuelle de légitimité

FN, Ligue du Nord et compagnie sont surtout utiles à Vladimir Poutine pour promouvoir et légitimer la politique russe à l’étranger. A contrario, ces partis pro-russes ont besoin de la Russie, car le pays représente une puissance mondiale qui partage leurs idées.

Identité chrétienne, anti américanisme, anti démocratie libérale, anti mariage pour tous, nationalisme et anti multiculturalisme sont quelques-unes des idéologies communes aux partis populistes et à Vladimir Poutine, qui partagent surtout une ambition: désunir l’Europe.

Poutine soutient l'extrême droite pour diviser l'Europe
Le vice-président de la Commission européenne Frans Timmermans estime que le président russe Vladimir Poutine soutient l’extrême droite et entretient des liens avec Marine Le Pen dans le but de diviser l’Europe pour l’affaiblir.

Soutien médiatique

Et rien de cela ne pourrait arriver sans le soutien précieux des médias détenus par l’État russe, comme Sputnik ou Russia Today 

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