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vendredi 19 novembre 2021

Grandir dans l’Allemagne nazie / Livre

 

Grandir dans l’Allemagne nazie / Brendon Votipka (texte), Anne Herold, Alouette Productions / AVP au Théâtre Aleph / Février 2020

Image d’entête : Gruppe von HJ-Jungen| Bundesarchiv, Bild 119-5592-14A / CC-BY-SA 3.0

La pièce, originellement écrite par Brendon Votipka dans une perspective pédagogique (pour être jouée dans des collèges), ne pouvait qu’être embellie par la mise en scène sobre mais puissante d’Anne Herold. Le décor, dépouillé – quelques chaises pour former, dans des dispositions différentes, tantôt un salon, tantôt une salle de classe, tantôt des supports pour les tirades des acteurs – laissait au texte l’espace nécessaire pour exprimer une réalité difficile à entendre, mais nécessaire.

Car c’était bien là l’important : le texte. Les trois acteurs principaux, incarnant trois réalités de la vie au sein du IIIème Reich, se succédaient donc sur scène – à force de belles tirades, parfois agrémentées d’un dialogue avec la figure d’un adulte, père, mère, frère, enseignant. Tous avaient un point commun : l’inquiétude. Ce qui ressort des différentes scènes, des différents discours – si opposés idéologiquement, c’est bien cette angoisse, magistralement incarnée. De la jeune juive qui voit ses libertés s’étrécir comme peau de chagrin au jeune homme des Jeunesses hitlériennes, en quête de reconnaissance familiale et sociale dans un parcours au sein du régime nazi, en passant par la jeune fille aux parents critiques et qui se laisse néanmoins pénétrer par la propagande… Tous les personnages partagent le désir, finalement universel, d’être reconnus, aimés, acceptés. Au-delà donc des discours terrifiants, échos d’un instinct grégaire et cruel, d’une colère sans but ou de la peur de l’autre, ce que l’auteur donne à voir, ce sont des enfants.



La mise en scène faisait s’alterner les passages parlés des acteurs, dans les moments de doute et de fierté qui jalonnent toute croissance, et des replongées dans le noir. Les lumières éteintes, si elles permettaient les changements de décor entre chaque tableau, étaient surtout agrémentées d’une bande sonore tantôt porteuse d’une atmosphère – on retiendra les discours d’Adolf Hitler et les chants d’époque – tantôt « contextualisante » – le bruit de la pluie, du verre brisé pour introduire la Nuit de Cristal. Sur le bord de la scène, un étendard nazi, rouge sang et orné de la si symbolique croix gammée, empêchait d’oublier le contexte de ces récits poignants. Au fond, un tissu noir permettait la projection d’images, là aussi contextualisantes.

On assistait donc à une sorte de compilation de scènes de vie, enrichies de monologues intérieurs qui permettaient de mettre des mots, de donner du sens au quotidien. Chaque tableau marquait une évolution par rapport au précédent ; une évolution historique, et personnelle. Cette évolution, c’est la circularité du spectacle qui permettait de la constater avec certitude : des trois chaises sur le devant de la scène – d’où les acteurs racontaient leur vie de famille au début – on revient à l’issue de la représentation aux trois mêmes chaises, aux trois mêmes acteurs, avec des discours bien différents, pleins de doute, d’amertume, mais aussi, d’espoir. Ce que Grandir dans l’Allemagne Nazie rend palpable, in fine, c’est donc surtout le douloureux passage de l’enfance à l’adolescence dans un contexte où les repères stables – l’école, les figures familiales – s’effacent et perdent de leur superbe.

— Éloïse BIDEGORRY

Grandir dans l’Allemagne nazie, une pièce de Brendon Votipka, a été traduite et mise en scène par Anne Herold. Le thème de cette pièce m’a aidé à me mettre dans la peau de plusieurs personnages et à voir l’histoire à travers différents angles de vue – car l’histoire est la même, mais le vécu de chaque personnage diffère […].

Dans cette pièce de théâtre, chaque personnage a un parcours différent, ainsi qu’une nationalité différente au sein de ces rapports tendus et cruels entre les Nazis et les Juifs. Chaque parcours représente une vie, un combat et un témoignage différent.

Dans cette pièce, deux rôles très différents sont joués par un seul et même acteur. Malgré sa maîtrise irréprochable des différents rôles, un autre acteur aurait peut-être donné plus de valeur et de réalité aux personnages aux yeux des spectateurs : on ne peut incarner à la fois l’ennemi et l’allié.

On ne voit pas de scènes d’entraînement d’Ernest lorsqu’il intègre la Jeunesse hitlérienne ; or il me semble que cette partie est très importante, car Hitler formait ces derniers comme des automates programmés pour tuer. Ernest décrit la Jeunesse Hitlérienne comme un camp de vacances où il se plaît, et non comme un camp où les jeunes allemands sont entraînés à devenir de futurs militants SS.

— Malia Nesrine BENABDALLAH

L'ALLEMAGNE NAZIE (1933-1939)

Profitant d’une grave crise économique et politique, Hitler est nommé chancelier d’Allemagne à partir de janvier 1933. En un peu plus d’un an, il établit une dictature totalitaire. Prônant la supériorité de la race aryenne, il renforce les mesures d’exclusion contre les races dites « inférieures ». Pour agrandir l’« espace vital » de la « race des seigneurs », Hitler lance un programme de réarmement qui débouche sur une politique d’agression.

PERSONNAGE CLÉ

Adolf Hitler (1889-1945) : né en Autriche, il connaît une jeunesse difficile. Blessé au cours de la Première Guerre mondiale, il prend en 1920 la tête du NSDAP (Parti national-socialiste des travailleurs allemands – le futur parti nazi). Après l’échec d’un coup d’État à Munich en 1923, il écrit en prison Mein Kampf – (Mon Combat), dans lequel il développe ses thèses antisémites et racistes. Nommé chancelier en janvier 1933, il installe rapidement une dictature totalitaire.

DÉFINITIONS

Chancelier : Chef du gouvernement (Premier ministre) en Allemagne.

SS : « Schutz Staffel » : sections de protection, milice au service du parti nazi.

Gestapo : « Geheime Staats Polizei » : police politique d’État.

1. L’ARRIVÉE DES NAZIS AU POUVOIR : 1933

Hitler prend le pouvoir de façon légale en profitant d’une grave crise économique et politique.

A. L’impact de la crise économique et politique (1930-1932)

À partir de 1930, l’Allemagne est durement touchée par la crise économique née aux États-Unis en 1929. La production s’effondre et le pays compte 6 millions de chômeurs en 1932. Les gouvernements se succèdent, incapables de maîtriser la situation.

Le mécontentement de la population s’exprime par la montée des partis extrémistes, dont le parti communiste, et le parti nazi dirigé par Adolf Hitler.

B. La prise du pouvoir par Hitler : 30 janvier 1933

L’arrivée au pouvoir d’Hitler se fait par des voies légales mais dans un climat de violence. De 1930 à 1932, tandis que les milices nazies – les SA, sections d’assaut – brisent les grèves et répandent la terreur dans la rue, les élections sont de plus en plus favorables au parti nazi, soutenu par des hommes d’affaires anticommunistes. Sous leur pression, le président Hindenburg nomme Hitler chancelier le 30 janvier 1933.

C. L’élimination des oppositions : 1933-1934

En quelques mois, les nazis imposent leur dictature. Ils commencent par éliminer les autres partis politiques : le parti nazi reste seul autorisé.

En mars 1933, Hitler reçoit les pleins pouvoirs. En juin 1934, par la purge sanglante de la « Nuit des longs couteaux », il fait supprimer une partie des chefs des SA.

Fermement soutenu par l’armée, Hitler devient à la mort du président Hindenburg, en août 1934, le Führer – le chef.

2. « EIN VOLK, EIN REICH, EIN FÜHRER » : LE TOTALITARISME HITLÉRIEN (1933-1940)

Hitler impose une dictature qui contrôle tout : c’est un totalitarisme. Le principe en est : un seul peuple – « ein Volk », dans un seul État ou « Empire » – « ein Reich » –, suivant un seul chef – « ein Führer ».

Le totalitarisme hitlérien

« Ein Volk »
un peuple
Suprématie de la race aryenne
Regroupement des populations de langue allemande
Exclusion des races « inférieures »
Élimination des juifs
Politique expansionniste agressive
« Ein Reich »
un Etat
(Reich = Empire)
État centralisé
Parti unique : parti nazi
Propagande
Embrigadement de la population
répression et terreur
camps de concentration
« Ein Führer »
un chef
Pleins pouvoirs à Hitler, guide infaillibleSerment de fidélité à Hitler
Fin des libertés fondamentales
Culte de la personnalité
PrincipesMoyens d’application

A. Un gouvernement autoritaire et centralisé

Entouré d’hommes qui lui sont dévoués, Hitler dirige un état centralisé et unifié où le parti nazi contrôle l’administration locale, les quartiers, les entreprises ; les libertés fondamentales sont supprimées.

Le « Führer » – le chef – détient tout le pouvoir. Il s’appuie sur la milice des SS qui exécute impitoyablement ses ordres.

Dirigée par Himmler, la Gestapo, police secrète d’état, arrête, torture et déporte les opposants dans les premiers camps de concentration, créés en 1933, comme Dachau près de Munich.

B. L’encadrement de la population

L’opposition est rendue difficile.

Une intense propagande, dirigée par Goebbels, utilise la presse, la radio, le cinéma et l’art. Les symboles hitlériens comme la croix gammée et l’aigle impériale sont affichés partout.

De grandes cérémonies militaires sont organisées, à Nuremberg, pour démontrer la force de l’armée réunie autour du Führer.

Les jeunes gens, embrigadés dans des organisations comme les « jeunesses hitlériennes », suivent un entraînement militaire obligatoire et obéissent aveuglément à leurs chefs. L’enseignement est contrôlé.

Les SS organisent des autodafés, bûchers où ils brûlent en public les livres interdits.

C. Une idéologie totalitaire

L’idéologie nazie se fonde sur l’idée de la supériorité de la race aryenne, race de seigneurs censée être représentée par les Allemands.

Une politique d’exclusion systématique se met en place contre les peuples dits « inférieurs ». Les plus touchés sont les juifs, qui sont exclus de la société par les lois de Nuremberg en 1935. Persécutés lors de la « Nuit de cristal » en novembre 1938, ils sont systématiquement éliminés à partir de 1942 : c’est la « solution finale ».

3. UNE POLITIQUE D’AGRESSION (1933-1939)

En tant que représentants de la « race des seigneurs » , les nazis veulent rassembler les Aryens, agrandir leur « espace vital » et rétablir la toute-puissance de l’Allemagne.

A. Économie et réarmement : les premiers défis (1933-1936)

Pour supprimer le chômage, l’État nazi entreprend d’abord de grands travaux autoroutiers et urbains.

Puis, en violation du traité de Versailles de 1919, il lance, à partir de 1936, un plan de réarmement de l’Allemagne et rétablit le service militaire obligatoire ; à la même date, il remilitarise la Rhénanie.

Le pays vit de plus en plus en autarcie : il doit devenir indépendant, produire ce dont il a besoin sans importations. Cette politique prépare la guerre.

B. Les agressions hitlériennes (1936-1939)

L’Allemagne sort de son isolement et se rapproche des autres dictatures.

  • Elle signe, en novembre 1936, une alliance avec l’Italie fasciste de Mussolini : l’« Axe Rome-Berlin ». De 1936 à 1939, ces deux pays aident le général Franco dans sa conquête du pouvoir en Espagne.
  • Enfin Hitler conclut un pacte avec le Japon : le pacte antikomintern, anticommuniste.

L’expansion nazie commence.

  • En mars 1938, Hitler réalise l’Anschluss en annexant l’Autriche, ce qui est interdit par le traité de Versailles.
  • Puis il réclame, en Tchécoslovaquie, la région des Sudètes, où se trouve un peuple de langue allemande. À la conférence de Munich, en septembre 1938, le Royaume-Uni et la France croient sauver la paix en acceptant les exigences d’Hitler mais celui-ci annexe entièrement la Tchécoslovaquie en mars 1939.
  • Enfin, pour préparer l’invasion de la Pologne, Hitler signe en août 1939 avec l’URSS le pacte de non-agression germano-soviétique et déclenche la Seconde Guerre mondiale.

En 1939, l’Allemagne nazie ne compte plus de chômeurs ; elle est devenue la deuxième puissance industrielle du monde. Mais elle connaît une dictature totalitaire antisémite et se lance dans l’éprouvante Seconde Guerre mondiale qui détruira ce régime.

À partir de 1939, Hitler et ses alliés se lancent dans la conquête rapide de l’Europe et de l’Asie. À la fin de 1941, la victoire leur semble acquise. Mais l’entrée en guerre de l’URSS, puis des États-Unis, ajoutée à d’immenses efforts, permet aux vainqueurs de sortir d’un conflit marqué par des génocides atroces.

http://keepschool.com/fiches-de-cours/college/histoire/allemagne-nazie.html#

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Le régime nazi du Reich (1933-1945) et la Seconde Guerre mondiale (1939-1945)

Prise du pouvoir

Le « jour de la prise de pouvoir » , le 30 janvier 1933, les nazis organisèrent une fête avec une retraite aux flambeaux sous la porte de Brandebourg. Peu après fut mise en œuvre la persécution des opposants politiques et la construction des premiers camps de concentration. Quelques 3 000 prisonniers, en grande partie des détenus politiques représentants de la gauche de la République de Weimar, des intellectuels et des artistes, ont été transportés au camp de concentration d'Oranienburg jusqu'à sa dissolution en 1934. Ils furent emprisonnés, interrogés et torturés mais aussi forcés à effectuer des travaux au sein de ce camp.

Après l'incendie du Reichstag de Hindenburg fut signé un décret d'urgence qui abrogea tous les droits fondamentaux constitutionnels en rapport avec la liberté individuelle, la liberté d'expression, d'association et de réunion. Hermann Göring (NSDAP), en sa qualité de dirigeant du « commissariat du Reich pour le ministère de l'intérieur prussien », se chargea de démettre le maire de Berlin, Heinrich Sahm, de ses fonctions en plaçant à ses côtés un « commissaire d'état pour la capitale de Berlin » le 15 mars 1933.
Le vote de la « loi sur les pleins pouvoirs » du 23 mars 1933 par le Reichstag ouvra définitivement le chemin à la mise en place de la dictature des nazis. Le 1er avril eut lieu la rencontre de la Stadtverordnetenversammlung, le parlement communal de Berlin, en l'absence des 44 représentants communistes dont les mandats avaient été annulés par décret. Le même jour se tint pour la première fois le boycott organisé par le NSDAP des magasins, cafés, bureaux d'avocats et cabinets médicaux juifs. Le bâtiment central de l'Université de Berlin, la bibliothèque nationale, les instituts et cliniques furent quant à eux occupés par des départements de la SA (les sections d'assaut nazies).

Autodafé et mise au pas

Le 10 mai, une « commission de combat contre l'esprit non allemand » et des étudiants brûlèrent des livres empruntés auprès de bibliothèques sur la place, devant l'ancienne bibliothèque (l'actuelle Bebelplatz).
En 1934, l'administration berlinoise fut « mise au pas », cela signifie que divers organismes élus furent dissolus en application de la « loi sur la Constitution de la capitale Berlin » et la capitale du Reich et du Land fut alors « gérée de manière autonome selon le principe du Führer ».
Le décès du président du Reich, Paul von Hindenburg, le 2 août 1934, fit, au sens d'une loi promulguée immédiatement, d'Adolf Hitler, en sa qualité de « Führer et Chancelier du Reich » le « commandant le plus haut placé » de la Wehrmacht.

Jeux olympiques de 1936

Pendant les Jeux olympiques d'été , organisés du 1er au 16 août 1936, tous types de symboles manifestant un certain antisémitisme furent évités à Berlin. La population allemande avait été priée de rester sympathique et polie envers les hôtes étrangers. Theodor Lewald, en tant que « demi-juif », fut autorisé à devenir le Président du comité d'organisation, la participation aux jeux fut concédée à la joueuse d'escrime « demi-juive » Helene Mayer et à un lutteur communiste. À l'abri des regards indiscrets et loin des projecteurs, les nazis construisirent un camp d'internement forcé pour les Roms et les Sinti à Berlin-Marzahn et le camp de concentration Sachsenhausen à Oranienburg.

Fête des 700 ans de Berlin

Le 700. e anniversaire de la ville de Berlin fut exploité par les dirigeants au pouvoir pour « orienter l'histoire de la ville avec force, vers une façon de penser adaptée au nazisme »*. Joseph Goebbels, le chef du district de Berlin et ministre de la propagande, inaugura une exposition en plein air à la tour de radio de la capitale sur l'histoire de Berlin. La population profita du bon temps lors des fêtes populaires et sportives organisées dans les arrondissements (entre autre « Stralauer Fischzug », une fête équestre historique à Zehlendorf). Le festival « Berlin pendant sept cents ans d'histoire allemande » organisé dans le stade olympique et le feu d'artifice sur la Königsplatz marquèrent la fin des festivités.

Nuit de Cristal

Les nazis affichaient de plus en plus clairement leur penchant pour l'antisémitisme et cette tendance prit des dimensions incroyables lors de la Nuit de Cristal le 9 novembre 1938. L'attentat commis par le Juif polonais Herschel Grynszpan sur un membre du personnel de l'ambassade allemande à Paris, se transforma en excuse pour la destruction de commerces et magasins juifs, de logements et de synagogues à Berlin mais aussi sur l'ensemble du territoire allemand (et à partir du 10 novembre en Autriche, territoire alors annexé). Les SA et SS incendièrent complètement onze des quatorze synagogues présentes à Berlin tandis que les trois restantes furent gravement endommagées. Ils déportèrent plus de 1 000 juifs arrêtés vers le camp de concentration de Sachsenhausen (Oranienburg).

Seconde Guerre mondiale

Contrairement à la Première Guerre mondiale, la Seconde Guerre mondiale a touché Berlin de plein fouet. Jusqu'à la capitulation du Troisième Reich les 8 et 9 mai 1945, les Alliés jetèrent 450 000 tonnes de bombes sur Berlin. Environ 20 000 Berlinois moururent sous les bombes et plus d'1,5 million d'habitants devinrent sans-abris. Pour répondre aux défaites en chaîne des Allemands sur tous les fronts, le ministre du Reich pour la propagande, Goebbels, appela les Allemands à une « guerre totale », le 18 février 1943, dans le palais des sports de Berlin. En avril 1945, des rassemblements de combattants allemands avec leurs quelques rescapés et le « Volkssturm » (Tempête du Peuple) composé de jeunes gens et d'hommes âgés entreprirent un combat sans espoir contre les soldats de l'Armée rouge dans les rues de la ville. La « bataille de Berlin » dura un mois (avril 1945) jusqu'à la capitulation. À la fin de cette guerre, la moitié des bâtiments placés à l'intérieur de la ville, avait été détruite et la population totale avait chutée de 4,3 à 2,8 millions d'habitants.

Conférence de Wannsee

La conférence de Wannsee tenue le 20 janvier 1942 dans une villa SS sur le Wannsee de Berlin rassembla des hauts représentants du régime nazi. L'objectif était d'organiser et de coordonner la « solution finale à la question juive ». Les représentants des administrations du Reich et des bureaux du parti définirent entre eux la procédure et la stratégie logistique pour la déportation des Juifs européens des territoires occupés de l'Europe de l'Est. Le mémorial de l'holocauste, la « villa de la conférence de Wannsee » nous rappelle aujourd'hui encore les plans élaborés à cet endroit pour la destruction ciblée.

Attentat contre Hitler

Le putsch planifié par la Wehrmacht, connu sous le nom d'opération « Walkyrie », échoua suite à l'attentat à la bombe sans succès commis contre Hitler. Le colonel comte von Stauffenberg et les conspirateurs qui lui étaient proches, furent fusillés le soir même dans le Bendlerblock (aujourd'hui mémorial pour la résistance allemande dans la Stauffenbergstraße). La vague d'arrestations, de faux procès et d'exécutions qui suivit, coûta la vie à environ deux cents personnes impliquées dans le coup d'état. L'exécution des personnes condamnées à mort par le tribunal du Peuple se tenait dans la prison de Plötzensee, de nos jours mémorial Plötzensee (une partie des mémoriaux dédiés à la Résistance allemande).

Capitulation

Pendant la « bataille de Berlin » les troupes soviétiques et polonaises s'emparèrent, à partir du 21 avril 1945, de la ville de Berlin assiégée. Hitler se suicida le 30 avril dans le bunker du Führer. Goebbels marcha sur ses pas le lendemain, au même endroit. Avant de mourir, il avait tenté en vain, en sa qualité de chancelier du Reich, de pousser Staline à déposer les armes. Les occupants de la ville gagnèrent le combat à Berlin le 1er mai 1945. Une semaine plus tard, dans le quartier général soviétique à Berlin-Karlshorst, Wilhelm Keitel, en tant que chef du commando supérieur de la Wehrmacht, signa la capitulation de toutes les forces armées allemandes.Une « Bet-ha-Knesset », une synagogue, a toujours été non seulement un lieu de prière mais aussi un lieu de rassemblement, d'enseignement et d'apprentissage. La nouvelle synagogue de l'Oranienburger Straße, est, avec son Centrum Judaicum, l'un des plus importants lieux actuels de la vie de la communauté juive en Allemagne. Autrefois, la Nouvelle synagogue était le plus grand et le plus majestueux lieu de culte d'Allemagne tout en étant l'expression consciente de la bourgeoisie juive établie de la ville. Le bâtiment de style mauresque a été édifié entre 1859 et 1866 d'après les plans d'Eduard Knoblauch et était un point d'attraction du génie civil et de l'architecture d'alors, avec la charpente en acier raffinée de la galerie et du toit et sa décoration intérieure élégante. Jusqu'à 3000 fidèles trouvaient place dans sa grande nef principale et sur les galeries. Une grande coupole dorée visible de loin couronne le bâtiment. Elle est flanquée d'une façade majestueuse décorée d'ornementations en briques et de deux tours dotées de coupoles également dorées. La synagogue fut protégée des dégâts causés durant la Nuit du pogrom en 1938 par l'entrée courageuse du commissaire de police du « Revier », mais elle fut gravement endommagée par les bombes durant la Seconde guerre mondiale. Lorsque l'on dynamita en 1958 la salle principale de la synagogue, seules les parties situées sur la rue tenaient encore debout. C'est en mai 1995 que le bâtiment proposant l'exposition permanente « Tuet auf die Pforten » (Ouvre les portes) a réouvert. L'exposition permanente raconte l'histoire de l'édifice et des vies associées. Une visite de l'exposition donne grâce aux documents et objets exposés, une impression des formes jadis diverses de la vie des Juifs dans ce quartier de Berlin. On peut deviner les dimensions considérables de l'ancienne salle principale de la synagogue en observant la surface libre derrière les parties restaurées du bâtiment.Heures d'ouverture (informations complémentaires).

Le musée Neue Synagoge Berlin – Centrum Judaicum  est fermé jusqu'au printemps 2018.


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ALLEMAGNE NAZIE

https://allemagnenazie.wordpress.com/2018/12/17/lhistoire-en-trompe-loeil/?fbclid=IwAR29ArO4J7XSRvS5OLHZBCPMeXN4al13RE8-_qW7YbwFUS-O7O87mzI68k8/

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La France, l’Allemagne, la mémoire…

 Par François Roche  |  04/09/2013, 1:09 | 1612 mots

Angela Merkel à Dachau, François Hollande et Joachim Gauck à Oradour-sur-Glane, la seconde guerre mondiale continue de marquer la mémoire collective de la France et de l'Allemagne.

Le 21 août dernier, en pleine campagne électorale, la chancelière Angela Merkel se rend à Dachau, près de Munich. C'est la première fois qu'un chef de gouvernement allemand en fonction pénètre dans ce camp de concentration, mis en place par le régime nazi dès mars 1933, où plus de 200 000 personnes furent enfermées jusqu'en 1945 (dont Léon Blum) et où 40 000 détenus, opposants politiques, juifs, tsiganes, homosexuels, prisonniers soviétiques, trouvèrent la mort. Dans son discours, Angela Merkel fait part de sa « honte » tandis que Dieter Graumann, dirigeant du conseil central des juifs d'Allemagne souligne que la visite de la chancelière « envoie le signe que l'horreur s'est aussi produite ici, parmi nous, en Allemagne. » Cette dernière remarque est à souligner, car elle illustre le travail accompli par les historiens, notamment à l'occasion des expositions qui se sont déroulées, en particulier à Berlin, depuis le début de l'année, pour commémorer le 80ème anniversaire de l'arrivée d'Adolf Hitler au pouvoir, et qui interrogeait, sans complaisance, la façon dont la société allemande avait, à l'époque, assisté à la montée en puissance du régime nazi.

 Quelques jours plus tard, le 25 août, le maire de ParisBertrand Delanoë, baptise l'esplanade de l'hôtel de ville, « Esplanade de la Libération », pour commémorer le 69ème anniversaire de la Libération de Paris, dans la nuit du 24 au 25 août 1944. Un événement dans lequel un éditorialiste très reconnu, d'une grande radio privée française voie une sorte d'invocation obsessionnelle d'une époque où la France était dans le camp des vainqueurs alors qu'aujourd'hui, elle serait « archi-dominée par l'Allemagne dans tous les domaines ». Cette clé de « lecture », livrée à une heure de grande écoute, à quelques jours des élections législatives en Allemagne, en dit long sur la prégnance, dans la mémoire collective des Français, de cette période de notre histoire et de la façon dont elle marque encore la relation entre la France et l'Allemagne.

 Enfin, le  4 septembre, François Hollande et le président allemand, Joachim Gauck commémorent ensemble le massacre d'Oradour-sur-Glane, en juin 1944, où 642 personnes furent tuées par les membres de la division SS Das Reich, symbole de la barbarie nazie en France.

 Ainsi, en quelques jours, surgit à nouveau dans les deux pays la mémoire de la seconde guerre mondiale, marqueur indélébile de nos histoires respectives, abîme terrifiant dans lequel l'Allemagne s'est autodétruite.  « Le souvenir de cette période doit continuer de vivre de générations en générations. Les jeunes doivent savoir comment lutter contre les tendances les plus extrémistes et transmettre ce savoir à nouveau à leurs enfants et petits-enfants » a dit Angela Merkel lors de son discours à Dachau (http://www.bundeskanzlerin.de/Content/DE/Rede/2013/08/2013-08-20-merkel-kz-dachau.html). Il est peu de dire que l'Allemagne travaille en permanence sur la transmission de cette mémoire. Il n'est que de constater la richesse de la production d'ouvrages et d'études en tout genre sur l'Allemagne nazie, dont l'abondance ne diminue pas avec le temps, bien au contraire. Les origines et le développement de l'antisémitisme, la montée en puissance puis la prise de pouvoir par les nazis, Hitler, la Shoah, le déroulement de la guerre, ses conséquences sur le peuple et la société allemandes, sont depuis plusieurs décennies, analysés et décortiqués par de nouvelles générations d'historiens dont seulement relativement peu de travaux sont traduits en langue française.

 Plongée dans l'intimité des familles et des combattants

 Heureusement quelques contributions nouvelles nous parviennent, qui éclairent souvent cette période sous un jour nouveau. Ainsi de deux ouvrages parus cette année en France, et qui ont un auteur en commun, Harald Welzer, 55 ans, un intellectuel très en vue en Allemagne, sociologue, professeur, chercheur et directeur du Centre de recherche interdisciplinaire sur la mémoire à Essen,  (http://de.wikipedia.org/wiki/Harald_Welzer). Il a co-signé, avec Sabine Moller et Karoline Tschuggnall, un premier livre qui a fait grand bruit en Allemagne lorsqu'il est paru, en 2002, « Opa war kein nazi », que les éditions Gallimard ont publié en français cette année sous le titre « Grand-Père n'était pas un nazi » ? Construit à partir de quarante-huit entretiens familiaux et de cent-quarante-deux interviews individuels, il explore la façon dont la mémoire familiale conserve et transmet le passé national-socialiste de l'Allemagne et le rôle que les membres de ces familles y ont joué. On y voit comment, écrit Harald Welzer l'histoire intime « encadre l'interprétation du passé, la compréhension du temps présent et la perspective d'avenir. » Le second livre, co-signé avec Sönke Neitzel, 45 ans, historien spécialiste de la deuxième guerre mondiale, professeur à l'université de Glasgow, « Soldats », est paru chez Gallimard cette année (et en 2011 en Allemagne). Ce livre restitue les conversations, écoutées par les Britanniques, de prisonniers de guerre allemands parlant des combats, du moral des troupes, de leurs propres actions, de leurs émotions et dont les transcriptions étaient restées dans les archives. Une source brute, touchant à l'intime des combattants et qui restitue une image à la fois brutale et tragique de la guerre et de l'idéologie nazie vue du côté des combattants allemands.

 Le point commun entre ces deux livres est qu'ils cherchent à pénétrer au fond de la conscience des Allemands, civils et combattants, non pour modifier la vision historique de cette période, mais pour chercher à en comprendre les ressorts intimes, dans une recherche de vérité et d'authenticité, comme une tentative nouvelle d'expliquer l'inexplicable. Ils expriment la profondeur de l'interrogation des Allemands, aujourd'hui encore, sur la façon dont leurs grands-parents et arrières grands-parents ont été d'une certaine façon anéantis par le nazisme.

 Les Allemands comme victimes

 Deux autres livres ouvrent des chapitres tragiques mais oubliés ou laissés de côté par la mémoire collective. Le premier est l'œuvre d'un jeune historien d'origine allemande, installé en France depuis l'âge de 12 ans, Valentin Schneider, spécialiste de l'armée allemande en France de 1940 à 1948 et docteur au Centre de recherche d'histoire quantitative de l'université de Caen. Dans « Un million de prisonniers allemands » il aborde le sort de ces prisonniers de guerre de la Wehrmacht retenus en France entre juin 1944 et  décembre 1948, dont le nombre avoisine le million, et qui ont participé à la remise en marché du pays dans l'immédiat après-guerre. Près de 20% d'entre eux ont d'ailleurs choisi de rester en France. Très peu de choses avaient été écrites chez sur ces « oubliés de l'histoire » dont Valentin Schneider décrit les conditions de vie et de travail et la façon dont ils se sont insérés dans l'effort de reconstruction, au prix d'une cohabitation souvent difficile avec la population française.

 Quant au second livre, « Les Expulsés », il n'est pas l'œuvre d'un historien allemand mais de Ray Douglas, professeur d'histoire contemporaine à l'université Colgate de New York. Il soulève le voile sur ce qui reste probablement comme la plus grand transfert forcé de population de l'histoire de l'humanité, celui de près de 14 millions de civils germanophones vivant en Tchécoslovaquie, en Hongrie, dans les zones d'Allemagne cédées à la Pologne, mais aussi en Roumanie et dans les Balkans.  Des centaines de milliers d'entre eux trouvèrent la mort au cours de ces transferts, réalisés dans des conditions parfois inhumaines, vers un pays, l'Allemagne, qui était en ruine, alors que ces populations, en majorité des femmes et des enfants, restaient parfois enfermés pendant plusieurs semaines dans des wagons de marchandise. Organisés par les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et l'URSS (la France s'y est opposée, car elle craignait un repeuplement excessif de l'Allemagne) cette migration forcée, réalisée au grand jour, est restée largement ignorée hors d'Allemagne où elle a fait l'objet d'un grand nombre de travaux. Elle aboutit à une immense catastrophe en termes humanitaires. Pourtant Ray Douglas prévient : « Il faut affirmer clairement, avant tout, qu'on ne peut légitimement établir aucune comparaison entre les expulsions d'après-guerre et les crimes de l'Allemagne à l'encontre des Juifs et d'autres victimes innocentes entre 1939 et 1945. La barbarie nazie telle qu'elle s'est déployée dans le centre et l'est de l'Europe a atteint une ampleur et une intensité qu'il est presque impossible de surestimer. (…). Ce qui se passa après la guerre ne peut être mis sur le même plan que les atrocités perpétrées par les Allemands pendant le conflit ; ceux qui ont prétendu le contraire- notamment parmi les expulsés- ignorent l'histoire et offensent la mémoire des victimes. Il ne faut pas en conclure pour autant que les expulsions étaient inévitables, nécessaires ou justifiées. »        

 Les livres de Valentin Schneider et de Ray Douglas traitent au fond du même sujet, celui des Allemands victimes de la guerre et qui y ont payé un tribut extrêmement lourd. C'est un terrain encore délicat, presque soixante-dix ans après la fin de la guerre. Mais il importe que ce travail soit fait, comme il l'a été concernant la première guerre mondiale dont on commémorera l'année prochaine le centenaire du déclenchement.

 

« Grand-Père n'était pas un nazi » de Harald Welzer, Sabine Moller et Karoline Tschuggnall », Gallimard, 2013.

« Soldats » de Sönke Neitzel et Harald Welzer », Gallimard, 2013.

« Un million de prisonniers allemands » de Valentin Schneider, Vendémiaire, 2013.

« Les Expulsés » de Ray Douglas, Flammarion, 2013.  

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Les Jeux olympiques de 1936 dans la presse française

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 9 OCTOBRE 2016

En 1931, le CIO confie l’organisation des prochains jeux olympiques d’été à la République de Weimar et à la ville de Berlin. Après la confirmation en 1935 de la tenue des jeux à Berlin, malgré l’accession au pouvoir du régime nazi, les nations s’interrogent sur leur participation.

 

Une polémique s’engage en France, notamment dans la presse. Le quotidien sportif L’Auto est pour la participation, au nom de l’apolitisme du sport. Dans le numéro du 8 avril 1936, Marcel Oger reconnaît que « la question juive est délicate », mais affirme qu’ « on ne peut pas, à l’occasion des Jeux olympiques, discuter la constitution politique d’un pays ». L’Humanité du 9 avril riposte dans un article intitulé « Pas à Berlin ! », où le journal défend vigoureusement le boycott : « Avec tous les amis de la paix, avec tous les ennemis du fascisme, nous crions : Pas un sou, pas un homme pour les Jeux Olympiques à Berlin ». Le mouvement international ouvrier tente d’organiser des olympiades populaires à Barcelone, mais le déclenchement de la guerre civile espagnole le jour même de leur ouverture les fera avorter.

 

Les préparatifs en Allemagne

Quarante-neuf nations, dont la France, participent finalement aux jeux de Berlin. Afin de donner à l’étranger l’image d’une Allemagne prospère et pacifiste, la ville est nettoyée, au sens propre comme au figuré ; La Croix du 31 juillet en témoigne : « Les nationaux-socialistes semblent décidés à prolonger le plus possible la bonne impression qu’ils entendent laisser à leurs visiteurs, qui, rentrés chez eux, propageraient tous l’évangile nouveau. […]Tous les tziganes de Berlin, même tous ceux d’Allemagne, viennent d’être emmenés dans une sorte de « parc national » - pour ne pas dire un camp de concentration – [...] à deux heures de la capitale [afin d’] épargner leur vue aux étrangers». L’Excelsior du 1er août, en revanche, salue « le magnifique effort des allemands en faveur du sport » : « Que l’on ne parle surtout pas de sport militaire, de préparation à une guerre. Cela, c’est de la politique, et les sportifs n’en veulent point » ; […] « cette jeunesse [allemande] n’est pas le moins du monde guerrière, elle vit simplement, comme il est bon de vivre avec du soleil dans les yeux et de la joie dans le cœur ».

 

La cérémonie d’ouverture

La cérémonie d’ouverture des jeux, le 1er août, donne lieu à des commentaires admiratifs du Petit Parisien : « Il nous faut dire la grandeur de ce spectacle, son atmosphère à la fois païenne et religieuse, la pure sobriété d’une cérémonie qui demeurera grandiose dans le souvenir de ses cent mille témoins ». Si l’ambiguïté du salut « olympique » effectué par la délégation française devant la tribune officielle créa la controverse, Le Petit Parisien se félicite simplement du « tonnerre des acclamations » et l’hebdomadaire sportif Match, dans son numéro du 4 août, légende ainsi une photo de l’évènement : « Mais voici que soudain on entend une ovation plus forte, plus délirante encore […]. C’est que l’équipe de France fait son entrée […] et que nos athlètes font le salut olympique qui ressemble, à s’y méprendre, au salut hitlérien ». L’Écho de Paris du 3 août, lui, s’interroge sur le salut des Français, qui lui paraît « un excès de zèle assez regrettable », et souhaite que le « comité olympique international décide d’un salut unique pour l’avenir, [afin] d’éviter des interprétations erronées ou des erreurs fâcheuses ».

 

Démonstration de gymnastes allemands dans le stade olympique - Match 18, août 1936

 

« Propagande allemande »

Dès le 2 août, l’éditorialiste du Figaro, Wladimir d’Ormesson, dénonce sous le titre « Propagande allemande » l’utilisation des jeux à des fins politiques et la facilité avec laquelle on détourne les yeux des méfaits du régime : « Il faudrait être bien sot pourtant de ne pas en apercevoir le côté politique ni les multiples profits que le IIIe Reich en recueillera sur tous les plans […] Les nuits du 30 juin, les pactes qu’on piétine s’oublient vite. Les camps de concentration ne se voient pas. La terreur dictatoriale est légère aux étrangers. Ceux-ci ne remarquent pas non plus les usines de guerre qui fument jour et nuit dans la Rühr et en Silésie ». Le Journal des débats du 10 août souligne qu’il ne faut pas se voiler la face quant aux enjeux véritables pour l’Allemagne : « le national-socialisme a voulu tirer des épreuves sportives des Jeux olympiques un bénéfice politique », et « donner à l’étranger l’impression que la nouvelle Allemagne jouit en paix d’un bien-être qu’une presse internationale malveillante s’obstine à contester ». Roger Mahler proteste contre les manifestations nationalistes dans Le Petit Parisien du 3 août : « Nous sommes ici à Olympie, au lieu de rassemblement de la jeunesse du monde, et le premier devoir du pays qui la reçoit est de s’effacer discrètement, sans imposer à ses hôtes de constantes démonstrations nationalisantes ».

 

Le triomphe de Jesse Owens

Sur le plan sportif, les jeux de 1936 furent marqués par le triomphe de l’athlète noir américain Jesse Owens, qui remporte quatre médailles d’or en athlétisme. Dans Paris-Soir du 6 août, Gaston Bénac le considère comme « l’athlète le plus prodigieux des jeux de Berlin – et des temps modernes aussi » ; « ce fut hier la journée de Jesse Owens, qui donna aux spectateurs quelques aperçus de vitesse et de détente musculaire, toujours dans ce style plein de finesse et de légèreté qui est le sien. Quel est celui des 100 000 spectateurs […] qui ne conservera pas […] la mémoire de ces « foulées merveilleuses » du grand lévrier noir ? ». Dans Match du 11 août, Maurice Sallet interroge Jesse Owens sur « la théorie de M. Waitzer, […] selon laquelle la supériorité des noirs en course s’explique par la construction anatomique de leur corps […]. Chacun de vos pas dépasserait de huit à dix centimètres ceux de vos adversaires blancs »… Le journaliste note au passage « le sourire candide » et « la tête d’oiseau de proie » de Jesse Owens, puis conclut en faveur de la valeur de l’individu : « Que deviendraient le plus astucieux entraînement et la plus ingénieuse théorie sans la valeur individuelle de ceux autour desquels nous brodons […] nos appréciations ? »

 

Jesse Owens gagnant sa série du 100 mètres. Le Figaro, 3 août 1936

 

Après les Jeux

Avec les jeux de Berlin le spectacle sportif est entré dans une nouvelle ère. Le Figaro du 17 août tire sa « Leçon des Jeux olympiques » : « Jamais encore les États Généraux du sport amateur n’avaient été présentés d’aussi prestigieuse et grandiose façon. Grâce en soit rendue aux Allemands. […] Après eux [les Américains], les révélations de ces jeux, sont, sur un même plan, les Allemands et les Japonais. […] En ce qui concerne les Allemands, on n’aurait jamais supposé qu’ils remporteraient des succès aussi nombreux et aussi caractérisés […] Ils ont produit, en vue de ces Jeux olympiques, l’effort qu’il fallait ». Suit une adresse au gouvernement français qui se conclut ainsi : « nous en sommes encore à attendre […], de tout le monde, cette amélioration de la race qui n’est possible que par le sport ». Jean Routhier dans L’Écho de Paris du 18 août fait un bilan similaire : « L’Allemagne hitlérienne dresse le bilan d’un succès sans précédent. Personne avant elle […] n’avait osé s’engager dans une telle entreprise et lui donner autant de magnificence. » Il demande aussi à l’État français de promouvoir le sport de masse et conclut : « Combien de temps encore assisterons-nous […] à la régénérescence des autres sans nous donner la peine d’assurer la nôtre ? C’est l’unique question que nous devons nous poser après les Jeux de Berlin ».

À l’opposé, L’Auto dénonce l’usage pervers que les nazis ont fait des jeux. Le 18 août, dans un éditorial intitulé « Les Jeux défigurés », Jacques Goddet écrit : « On s’est servi du sport. On ne l’a pas servi. L’idéal de M. de Coubertin s’est évanoui. » Le lendemain, Robert Perrier renchérit : « Les Jeux de 1936 n’ont été qu’un prétexte. […] Le parti national-socialiste de Hitler sort grandi des Jeux. Ne le nions pas. Le chancelier pourra dire demain au fameux congrès de Nuremberg : voyez la puissance de l’Allemagne ! ». Dans Paris-Soir du 20 août, Gaston Bénac déplore le chauvinisme des Allemands fanatisés par leurs dirigeants et conclut : « Donc, tromperie sur les tendances et les principes, tromperie sur l’atmosphère qui devait être impartiale, au rayonnement pacifique, tromperie sur la marchandise aussi, tels apparaissent les jeux modernes ».

https://gallica.bnf.fr/blog/09102016/les-jeux-olympiques-de-1936-dans-la-presse-francaise?mode=desktop

 

 



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