Christian Ingrao, historien (n.1970)
Biographie de l'auteur
Chargé de recherche au CNRS, ancien directeur de l'Institut d'Histoire du Temps Présent (2008-2013), il est l'auteur de Les Chasseurs noirs : la brigade Dirlewanger (Perrin, 2006) et Croire et détruire : les intellectuels dans la machine de guerre SS (Fayard, 2010). Il est l'un des meilleurs spécialistes français du nazisme.
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Christian Ingrao, né le 13 juin 1970 à Clermont-Ferrand, est un historien français, directeur de recherche au CNRS. Spécialiste de l’histoire du nazisme et de la violence de guerre, il se consacre à l'histoire culturelle du militantisme nazi et aux pratiques de violence allemandes notamment sur le front de l'Est. Il est directeur de l’Institut d’histoire du temps présent de 2008 à 2013.
Biographie
Origines et formation
D'une famille d'Auvergne, il a fait ses études au lycée Ambroise-Brugière. Il poursuit ses études à l'université Clermont-Ferrand-II et à l'université Paris-Sorbonne. Il est agrégé (1995)2 et soutient en 2001 une thèse de doctorat en histoire intitulée « Les intellectuels SS du SD, 1900-1945 », à l’université de Picardie, sous la direction de Stéphane Audoin-Rouzeau et de Gerhard Hirschfeld. Il présente un mémoire d'habilitation universitaire en 20164.
Carrière
De 2001 à 2004, il effectue une recherche postdoctorale à la Hamburger Stiftung zur Förderung von Wissenschaft und Kultur. Chercheur associé à l’IHTP. Il est coresponsable et coordinateur scientifique du groupe de travail « Violence de guerre, approches comparées sur le xxe siècle » (Historial de la Grande Guerre/IHTP) et coordinateur en France du projet « Borderlands. Identity, ethnicity and violence in the Shatter zone of Empires 1848-1945 », (en collaboration avec l'Université Brown, l'université du Minnesota, l'université Stanford et le Simon-Dubnow-Institut (de) à Leipzig. Il poursuit ses travaux au Hamburger Institut für Sozialforschung (de) avec un projet : « Vers une histoire culturelle de la violence nazie. Le cas de la politique de lutte contre les partisans. Fronts de l’Est (Pologne, URSS, Balkans) 1939-1945 »
De 2005 à 2008, il est chargé de recherche au CNRS, directeur-adjoint de l’Institut d’histoire du temps présent et maître de conférences à l’IEP de Paris.
En juin 2008, il succède à Fabrice d'Almeida en tant que directeur de l'l’Institut d’histoire du temps présent. À la fin de ce mandat, en décembre 2013, il est remplacé par Christian Delage.
Il participe au documentaire Jusqu'au dernier: la destruction des juifs d'Europe, de William Karel et Blanche Finger.
Publications
Essais
Les chasseurs noirs: essai sur la Sondereinheit Dirlewanger, Paris, Perrin, 2006.
(Traduction en anglais) The SS Dirlewanger Brigade: The History of the Black Hunters, traduction du français par Phoebe Green, Skyhorse publishing, 2011, 272 p.
(Traduction en polonais) Czarni mysliwi Brygada Dirlewangera, Czarne, 2011, 304 p.
(Traduction en tchèque) Černí lovci: dosud neodhalené zločiny speciální bojové jednotky SS Dirlewanger, Víkend, 2009, 252 p.
Croire et détruire : les intellectuels dans la machine de guerre SS, Paris, Fayard, 20106.
(Traduction en allemand) Hitlers Elite: die Wegbereiter des nationalsozialistischen Massenmords, traduction du français par Enrico Heinemann et Ursel Schäfer, Bundeszentral für Politische Bildung, Bonn, 2012, 569 p.
(Traduction en italien) Credere, distruggere. Gli intellettuali delle SS, Einaudi, 2012, 408 p.
(Traduction en anglais) Believe and Destroy: Intellectuels in the SS War Machine, Polity, 2013, 432 p
(Traduction en portugais) Crer e destruir. Os intelectuais na maquina de guerra da SS nazista, traduction du français par André Telles, Zahar, 2015, 480 p.
(Traduction en espagnol) Creer y destruir. Los intelectuales en la máquina de guerra de las SS, traduction du français par José Ramón Monreal. Acantilado, 2017, 624 p.
Le nazisme et la guerre, Reims, Éditions Le clou dans le fer, 2011.
La promesse de l'Est : espérance nazie et génocide (1939-1943), Paris, éditions du Seuil, 2016.
The Promise of the East: Nazi Hopes and Genocide, 1939-43, traduction en anglais d'Andrew Brown, Polity Press, 2018, 320 p.
Avec Johann Chapoutot, Hitler, Paris, PUF, 2018, 212 p.
Christian Ingrao, Les urgences d'un historien : entretien avec Philippe Petit, Paris, Le Cerf, 2019, 136 p., avec Philippe Petit.
Christian Ingrao, Croire et détruire: Les intellectuels dans
la machine de guerre SS
Fayard/Pluriel (26 octobre 2011), Poche: 704 pages
Ils étaient quatre-vingts et
avaient à peine trente ans lors de l’arrivée d’Adolf Hitler au pouvoir. Leurs
études universitaires destinaient ces juristes, économistes, linguistes,
philosophes ou historiens à de belles carrières. Ils ont choisi de s’engager au
sein des organes de répression du Troisième Reich. Ils ont théorisé et planifié
l’élimination de vingt millions d’individus de race prétendument « inférieure
». Ils ont organisé et assisté à l’extermination d’un million d’entre eux.
Au long d’une enquête éprouvante
dans les archives du SD et de la SS, Christian Ingrao retrace le destin de ces
enfants de la Grande Guerre, s’intéresse à leurs réseaux – militants,
universitaires ou amicaux –, étudie leurs manières d’envisager la guerre et le
« Monde d’ennemis » qui, selon eux, les menace. Apparaissent alors les
mécanismes de l’engagement, dans le nazisme puis dans le meurtre de masse.
Grâce à cette étude pionnière, on comprend comment ces hommes ont fait pour
croire et pour détruire.
Car l’histoire du nazisme est aussi tissée d’expériences personnelles, de ferveur et d’angoisse, d’utopie et de cruauté.
Meilleures évaluations de France
Commenté en France le 8 juin 2015
Les intellectuels sont
influençables ' j'en suis une ' et plus encore lorsqu'ils sont universitaires '
j'en suis une aussi. Si l'on ajoute à cela que les intellectuels universitaires
ont en commun une estime de soi souvent en douleur et un narcissisme bien plus
endolori encore par une reconnaissance sociale qu'ils estiment en général sans
commune mesure avec leurs éminentissimes qualités, il ne faut plus alors
s'étonner de voir bon nombre d'entre eux s'enticher de ces idéologies
totalitaires qui leur offriraient enfin ce statut que la société s'entête à
leur refuser. Lorsque ces idéologies sont bénignes ou trop faiblement
implantées pour vraiment nuire, la chose reste sans gravité et l'on peut
continuer de sourire de les voir s'enticher de Political Correctness, se faire
écologistes fondamentalismes, errer d'un modèle interprétatif à l'autre au gré
des modes comme trop d'entre eux l'ont fait du pétainisme, du stalinisme ou du
maoïsme. En revanche, lorsque les choses se gâtent, que leur douleur rencontre
la force d'État, ils peuvent alors finir en commandants d'Einsatzgruppen ou en
chefs de Konzentrationslager.
Christian Ingrao ' universitaire
lui-même ' livre une analyse extraordinairement fine, pertinente, passionnante
des mécanismes qui ont entrainé les intellectuels allemands dans la SS. Il
argumente avec un sens de la preuve qui fait de son livre une véritable leçon de
critique historique. Il y évoque les dégâts qu'a occasionnés la ruine de
l'estime de soi d'un peuple porté par l'antisémitisme, ruiné par le traité de
Versailles, l'occupation de la Ruhr, l'hyperinflation, la crise de 1929. En
somme, il ne fait que montrer que, lorsque la ruine collective d'une estime de
soi se superpose à ces difficultés narcissiques si particulières aux
intellectuels, il ne manque alors plus qu'un Adolf pour susciter une
monstruosité ' mais il y eut aussi des Staline, des Mussolini, des Mao, des Pol
Pot, des Kim Il Sung. Au sortir du livre de Christian Ingrao, on ne devrait
alors plus avoir qu'un but: détecter qui sera le suivant ' on pourrait aussi
fermer les Universités, mais cela serait mal reçu.
Commenté en France le 27 octobre
2016
Recourant massivement à
l'anthropologie et à la notion de culture de guerre, Christian Ingrao montre
comment la Première Guerre mondiale fut la matrice des projets exterminateurs
mis en place à l'Est dans les années 1940. S'intéressant principalement à un
groupe de 80 intellectuels SS, l'historien français analyse les raisons qui
conduisirent ces hommes fortement cultivés et hautement diplômés, tous nés vers
1900 et peu après, à planifier la mort de dizaines de millions d'individus.
Traumatisés par la Grande Guerre
et la période qui lui succéda jusqu'au début des années 1920, ils réinvestirent
à l'Est la culture de guerre intériorisée en 14-18 et adjuvée du déterminisme
racial et du millénarisme nazis. Le système de croyances nazi apporta en effet
une réponse à leur angoisse eschatologique, à leur délire obsidional. Pétris de
nazisme, nourris d'un imaginaire de croisade et d'une espérance impériale,
bouffis d'une rhétorique de guerre totale, ces intellectuels entrèrent dans
l'action à partir de 1939, planifiant et légitimant mises à mort et
déportations, colonisation et germanisation, participant activement aux
violences génocidaires des groupes mobiles de tuerie.
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L'édition, agréable à utiliser, contient un index, un répertoire des sources, une abondante bibliographie et un intéressant exposé des choix méthodologiques et historiographiques de l'auteur.
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Cet ouvrage, issu d'une thése
universitaire et d'une recherche documentaire poussée , est copieux ( 600 p) et
d'une lecture malaisée en raison de son style mais surtout de l'utilisation
constante des sigles de l'époque qui nécessite un recours au glossaire pour le
non spécialiste .
Au delà d'un travail sérieux
d'historien , les explications avancées ( pourquoi eux ? ) sont peu
convaincantes car oublieuses des ressources actuelles de la sociologie mais
surtout de la psychologie analytique ou en tirent des analyses pour le moins
spécieuses .
Le plus génant est dans le titre
: qualifier d'intellectuels des universitaires variés est abusif ; les
véritables intellectuels allemands , dés 1930 , avaient fui ou étaient
persécutés voire neutralisés dans tous les sens du terme .
Cet ouvrage, à mon avis, réservé aux spécialistes ou experts du sujet , m'en apprend moins que quelques pages d'Hannah Arendt , de Luigi Zoja et bien d'autres
Commenté en France le 11 mai 2020
Etude qui ressemble à une thèse sociologique. Très intéressant cependant ; il y a une présentation qui ouvre des horizons que l'on ne connait souvent que superficiellement. Il y a beaucoup de place pour le débat et la discussion quand on termine cet ouvrage ; d'autant que l'auteur ne clôt pas ses réflexions, nous laissant élargir notre vision en fonction de nos connaissances personnelles.
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Christian Ingrao, La Promesse de l'Est. Espérance nazie et génocide (1939-1943), Seuil, 3 octobre 2016,480 pages
Comment les nazis ont-ils rêvé leur victoire et le " Reich de mille ans " ?
Entre 1939 et 1944, l'utopie impériale nazie connut des débuts de réalisation dans les espaces conquis à l'Est, brutalement vidés de leurs habitants, déplacés, réduits en esclavage et, pour les Juifs, assassinés. Elle eut ses ingénieurs, ses agences et ses pionniers (pas moins de 27 000 jeunes Allemands). Elle suscita de la ferveur et de l'adhésion. Dans le Reich de mille ans aux frontières élargies par la conquête, une communauté racialement pure vivrait bientôt une existence réconciliée de prospérité sereine.
Christian Ingrao examine pour la première fois, dans leur cohérence et dans leurs tensions, le travail des différentes institutions, le parcours des hommes et des femmes qui y ont pris part, l'ampleur des planifications successivement dessinées. Il poursuit une anthropologie sociale de l'émotion nazie et dévoile, à côté de la haine et de l'angoisse, la part de la joie et de l'attente, deux faces d'une même réalité.
L'espérance nazie fut le cauchemar des populations. C'est ce que révèle crûment l'étude des violences déchaînées à l'échelle de la région de Zamosc, aux confins de la Pologne et de l'Ukraine.
Un grand livre, qui porte sur l'un des aspects les plus méconnus du nazisme.
Chargé de recherche au CNRS, ancien directeur de l'Institut d'Histoire du Temps Présent (2008-2013), il est l'auteur de Les Chasseurs noirs : la brigade Dirlewanger (Perrin, 2006) et Croire et détruire : les intellectuels dans la machine de guerre SS (Fayard, 2010). Il est l'un des meilleurs spécialistes français du nazisme.
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Christian Ingrao, Le Soleil noir du paroxysme: Nazisme, violence de guerre, temps présent, Odile Jacob, 3 mars 2021,448 pages
Ce livre de Christian Ingrao a deux facettes. D’une part, c’est un texte d’historien sur des objets historiques situés : les discours, les représentations et les émotions des acteurs du génocide nazi ; le suicide de guerre en Allemagne et au Japon en 1945 ; la médecine d’urgence face aux attentats du 13 novembre 2015. Captivant. D’autre part, c’est un essai pour penser l’histoire, qui expérimente des rapprochements conceptuels et disciplinaires, qui analyse et met à l’épreuve notions et méthodes. Éclairant.
À la fois livre d’histoire et livre sur l’histoire, il présente au lecteur l’œuvre et la fabrique, dans un va-et-vient entre théorie et pratique qui fait la force du propos. Ainsi, la notion de paroxysme est d’abord analysée comme outil théorique pour l’historien, puis appliquée à des objets historiques qui en sont des figures et dont l’auteur est un spécialiste.
On découvre l’historien au travail, réfléchissant sur sa démarche et ses concepts avant de les mettre en œuvre pour explorer des passés utiles pour comprendre le présent.
Tirant le bilan de vingt années d’enquête sur le nazisme et la violence de guerre aux xxe et xxie siècles, Christian Ingrao entreprend d’esquisser aussi « un avenir désirable pour l’histoire du temps présent ».
Un livre d’histoire en même temps qu’un regard sur l’histoire de demain.
Christian Ingrao est historien, directeur de recherche au CNRS. Il a dirigé l’Institut d’histoire du temps présent (2008 à 2013), enseigne à l’IEP de Paris. Il a écrit sur le nazisme et les violences de guerre aux XXe et XXIe siècles.
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