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mardi 21 avril 2020

Geneza impresionismului



Impressionnisme : les années lumière


Charles-François Daubigny, Les Péniches à Bezons.
A la fin du XIXe siècle, un petit groupe de peintres délaisse l'art académique en vogue. Raillés à leurs débuts, Monet, Manet, Cézanne et consorts font pourtant rapidement partie du paysage artistique. Alors que s'ouvre la troisième édition du Festival Normandie Impressionniste, genèse d'un mouvement qui passionne toujours.
C'est une lassitude naissante. Alors qu'un large public se rue aux expositions consacrées à la peinture impressionniste, l'ennui se lit dans certains regards praticiens. La moue est de mise. L'élite — ou ce qui se prend pour telle — se définit souvent elle-même par rapport à la masse et à ses engouements. Il faut aimer le rare et se méfier des enthousiasmes populaires. C'est l'une des formes du snobisme. L'industrie culturelle n'arrange rien. L'impressionnisme, qui a désormais son festival en Normandie, est devenu la Thaïlande de la peinture : une usine touristique. A Giverny, l'ancienne demeure de Claude Monet (1840-1926) prend une allure disneyenne. Les autocars garés dans les immenses parkings déversent des flots de badauds rigolards et sympathiques. Partout les expositions se multiplient, et avec elles les produits dérivés — on peut même y acheter des graines de nymphéa. Les musées adoptent le mercantilisme des supermarchés. L'impressionnisme se consomme. Il fait recette.
Il y a un siècle et demi, l'élite et le peuple s'accordaient pourtant pour dédaigner les premiers signes de cet art nouveau. Le monde changeait. La bourgeoisie triomphait. Grâce à la révolution industrielle, elle pouvait à présent ­dominer la nature, l'asservir, l'exploiter. L'art académique — les Cabanel, Baudry, Meissonier — lui offrait l'image valorisante de son succès : une certaine perfection de la touche et une idéalisation du sujet qui lui garantissaient, pensait-elle, d'être l'héritière de l'aristocratie défunte et de son art. Elle s'inventait une généalogie. Elle ne s'était pas rendu compte que la peinture de Manet ou celle du jeune Monet suivait le cours de l'Histoire et son bouleversement, qu'elle prenait en compte les découvertes scientifiques récentes et partageait avec elle, la bourgeoisie, certaines valeurs, en particulier le travail et le progrès.
Claude Monet, Impression, soleil levant (1872).

Les origines

En 1857, Charles François Daubigny (1817-1878) se fait construire un petit bateau muni d'une grande cabine, le Botin (la petite boîte), afin d'étudier les effets de la lumière sur l'eau — l'invention du tube de peinture permet désormais aux artistes d'oeuvrer sur le motif. Daubigny navigue sur l'Oise et la Seine. Il travaille en plein air. On parle beaucoup, à propos de la naissance de l'impressionnisme, de l'apparition de la photographie et de la théorie des couleurs de Chevreul. La première aurait poussé les peintres à abandonner le portrait pour le paysage et la seconde les aurait instruits sur la loi des contrastes simultanés des couleurs (une couleur change de tonalité lorsqu'elle est à proximité d'une autre couleur). On a aussi prétendu, à tort, que les impressionnistes se méfiaient de la photographie alors que la charge la plus violente contre cette technique nouvelle vient d'un artiste classique, Jean Dominique Ingres (1780-1867). Mais on parle peu de Daubigny.
Daubigny est fasciné par la nature et la lumière. Au milieu du XIXe siècle, cette foucade n'a pas bonne presse. Baudelaire, dont on vante si souvent la clairvoyance, écrit, dans son compte rendu du Salon de 1859 : « J'avouerai avec tout le monde que l'école moderne des paysagistes est singulièrement forte et habile ; mais dans ce triomphe et cette prédominance d'un genre inférieur, d'un culte niais de la nature, non épuré par l'imagination, je vois un signe évident d'abaissement général. » Ici, le mot qui importe est « imagination ». Jusque-là, l'histoire de la peinture est celle d'un imaginaire ; avec les peintres de Barbizon (Corot, Millet ou Théodore Rousseau), auxquels est associé Daubigny, on passe à une peinture de la perception : ils peignent, comme les impressionnistes un peu plus tard, le monde tel qu'ils le voient, avec leur regard de peintres. « L'imaginaire traditionnel disparaît de la peinture, écrit l'historien de l'art Gaëtan Picon (1) , parce qu'il disparaît de l'esprit, de la société. » Ainsi les nus de Manet, celui de l'Olympia (1863) ou celui du Déjeuner sur l'herbe (1863), n'évoquent plus les Vénus antiques mais montrent une femme ordinaire — et pour Olympia, qui plus est, une cocotte.
L'importance de Daubigny, qui se déclare, en 1865, « chef de l'école de l'impression », ne s'arrête pas au tableau lui-même. Membre du jury des Salons de 1866 et 1868, il fait accepter les jeunes Pissarro, Renoir, Cézanne, Bazille, Degas, Monet, Sisley et Berthe Morisot. En 1870, réfugié à Londres durant la guerre, il présente Monet à son marchand, ­Durand-Ruel, qui deviendra le soutien des peintres impressionnistes. Vers la fin de sa vie, Daubigny rencontrera des problèmes avec la critique et l'institution. Présenté au ­Salon de 1873, La Neige est sévèrement jugé car on pense la toile inachevée. Or, c'est cette même accusation que ­subiront en 1874 les œuvres des jeunes impressionnistes : ils ne finissent jamais leurs tableaux.
Eugène Boudin, Etude de nuages sur un ciel bleu (vers 1890).

Les débuts

Tout commence à l'aube des années 1860, dans l'école privée dirigée par le peintre Charles Gleyre que fréquentent Monet, Bazille, Sisley et Renoir. Gleyre, par ailleurs professeur aux Beaux-Arts de Paris, défend un art idéal alors que seule la réalité intéresse ses élèves. L'art idéal consiste à embellir ce qui peut apparaître laid. Un pied peint par Monet, par exemple, opposera Gleyre qui le voudrait beau au jeune artiste qui le peint tel qu'il le voit. L'art idéal transforme le réel en imaginaire — la femme en Vénus, l'homme en Hercule, le paysage en Eden. La bourgeoisie l'adore.
De cette bourgeoisie fortunée est issu Frédéric Bazille. Doté, il peut aider ses amis démunis — les peintres, n'étant plus les protégés de l'Eglise et de l'aristocratie, paient cher leur liberté. Renoir et Monet travaillent dans son vaste atelier. Tous fuient l'enseignement de Gleyre et se tournent vers Edouard Manet, qu'ils rencontrent en 1866 dans un bistrot de la place Clichy, le Café Guerbois. Ensemble, ils cherchent une alternative au Salon annuel auquel la plupart d'entre eux n'ont pas accès (ce n'est pas le cas de Monet, qui, en 1865, expose avec succès deux paysages, puis, l'année suivante, La Femme en robe verte). Le refus d'idéalisation caractérisant leurs œuvres n'échappe pas à Zola, adepte du réalisme initié par Millet et Courbet. Dans le quotidien L'Evénement, l'écrivain les défend en fulminant contre le principe du Salon qu'il compare à un « immense ragoût artistique ». Mais la guerre entre la France et la Prusse, déclarée le 19 juillet 1870, sépare un temps le groupe. Et le 28 novembre, lors de la bataille de Beaune-la-Rolande, Frédéric Bazille est tué (2) . Il a 28 ans.
Claude Monet, La Gare Saint-Lazare, issu d’une série de douze tableaux sur la gare parisienne (1877).

Les expositions

Le groupe se reforme après la guerre, en 1872. Il fréquente maintenant un café de Pigalle, la Nouvelle Athènes. Bazille disparu, c'est le marchand Durand-Ruel qui subvient (à peu près) aux besoins des artistes en leur achetant des tableaux. Toujours opposés au principe du Salon, aussi bien l'officiel que celui des Refusés, les jeunes gens créent le 23 décembre une Société anonyme coopérative d'artistes peintres, sculpteurs et graveurs, et le 15 avril de l'année suivante organisent une grande exposition dans les anciens ateliers du photographe Nadar. Vingt-neuf artistes, dont Félix Bracquemond et Eugène Boudin, venus sur le tard rallier le mouvement, y participent. Une centaine de toiles sont montrées. L'une d'elles, Impression, soleil levant (1872), de Monet, vaut à l'ensemble, sous la plume moqueuse du critique Louis Leroy, le surnom d'« impressionnisme ». Il restera. La plupart des œuvres étant composées de petites touches colorées juxtaposées, le public ne comprend pas pourquoi ce qu'il voit sur la toile ne ressemble plus à ce qu'il voit autour de lui. Il raille.
La deuxième exposition, l'année suivante, organisée par Durand-Ruel dans sa galerie louée aux artistes, offre une place importante à Ludovic-Napoléon Lepic. Cofondateur de la Société anonyme coopérative, ancien élève de Gleyre, ami intime de Degas, Lepic est un rejeton de la noblesse d'Empire dont le style réaliste a peu à voir avec l'impressionnisme. Le public boude toujours, la presse se moque, et seul Sisley voit ses tableaux, on ne sait trop pourquoi, encensés. Les premières dissensions apparaissent. Pissarro et Cézanne fondent un groupe dissident, l'Union ; Degas s'éloigne ; un nouvel adhérent arrive : Gustave Caillebotte.
Caillebotte peint d'après photographies, dans un style plus réaliste qu'impressionniste — « une piètre chose », juge Zola. Mais il est riche et généreux. Il achète beaucoup de tableaux à ses nouveaux amis. Grâce à lui se tient, en avril 1877, la troisième exposition dans un appartement. Cézanne y revient avec des paysages de l'Estaque. Zola défend Monet, tandis que Stéphane Mallarmé prend fait et cause pour Manet. Le public se moque. L'exposition devient une promenade amusante. On s'y habitue. On y vient comme à Guignol. Et peu à peu, malgré ou grâce au persiflage, la peinture impressionniste s'installe dans le paysage artistique parisien.
Ainsi, chaque année jusqu'en mars 1882, se tient l'exposition de la Société anonyme coopérative. Certains partent et d'autres apparaissent : Paul Gauguin, en 1879, provoquant le départ temporaire de Monet, Renoir, Cézanne et Sisley, qui n'aiment pas sa peinture ; ou l'Américaine Mary Cassatt. L'ultime exposition, après trois ans d'arrêt, a lieu en 1886, mais entre-temps Manet est mort, et Seurat et Signac ont inventé le divisionnisme (ou le pointillisme ou le néo-impressionnisme), principe pictural où il ne s'agit plus tant d'exprimer une impression que d'appliquer rigoureusement le concept du contraste simultané des couleurs inventé par Chevreul.

Les paysages

Il est tout à fait remarquable que la grande majorité des œuvres des peintres impressionnistes, à l'heure où le monde bascule, où débute ce que Paul Valéry nommera plus tard la « transformation profonde, rapide, irrésistible de toutes les conditions de l'action humaine », évitent de représenter les signes de la révolution industrielle. Ils recherchent au contraire des lieux qui en sont préservés. C'est un véritable jeu de cache-cache — et même dans sa série de douze toiles consacrées à la gare Saint-Lazare (1877), Monet se passionne beaucoup plus pour la sensation lumineuse créée par la fumée des locomotives s'élevant dans le ciel et sous la verrière que pour le train lui-même. Plutôt que les usines et les ouvriers, les peintres cherchent à représenter la nature, la mer et la campagne — la lumière.
Parmi ces lieux préservés figure la Normandie. Monet, né à Paris, passe son enfance au Havre. En 1858, à 18 ans, il y rencontre Eugène Boudin, né à Honfleur, grand peintre de marines qui l'initie à la peinture de paysages. Après son service militaire en Algérie, en 1862, il retrouve Boudin et se lie d'amitié avec le Néerlandais Jongkind, qui, comme Boudin, peint des paysages marins sur le motif. Tous trois fréquentent la ferme Saint-Siméon, une auberge située sur les hauteurs de Honfleur où Boudin a ses habitudes. En 1864, Monet y emmène Frédéric Bazille, qu'il vient de rencontrer chez Gleyre. Puis, alternant avec les séjours à Paris, le peintre ne cesse de suivre le cours de la Seine, s'installant à Vétheuil en 1878, puis, en 1883 et jusqu'à sa mort, à Giverny.
De là est née l'idée que l'impressionnisme avait des bases normandes. La plupart des peintres — Manet à Cherbourg, Morisot à Fécamp, Degas au Pin-au-Haras, Gauguin à Dieppe, Pissarro au Havre — font de brefs séjours en Normandie. Renoir va bien passer à partir de 1879 plusieurs étés près de Dieppe chez le riche banquier Paul Bérard, où il peint de nombreux tableaux, mais son intérêt ne le porte pas tant vers le paysage que vers les confortables revenus que ça lui assure. Quant à Sisley, c'est aussi à l'invitation d'un collectionneur, Paul Dépeaux, qu'en 1894 il quitte Moret-sur-Loing pour séjourner à Mesnil-Esnard, près de Rouen. En réalité Pissarro préfère les bords de l'Oise, Sisley, ceux du Loing ; Renoir et Cézanne, la Méditerranée, et Degas, plus Degas qu'impressionniste, Paris.

La critique

Degas, un peintre impressionniste ?

Peinture, dessin

Les artistes

Une photographie prise en 1873 à Auvers-sur-Oise montre un groupe d'artistes impressionnistes posant dans le jardin d'une maison. Paul Cézanne est assis sur un banc en bois ; il regarde le sol. Lui faisant face, debout, Camille Pissarro, la tête baissée, regarde la même chose que Cézanne : rien. Autour d'eux figurent trois autres peintres, Armand Guillaumin, Victor Vignon et Frédéric Cordey. Si le premier est passé à la postérité, l'histoire a laissé dans l'ombre les deux autres. Ils partagent ce purgatoire avec Pierre Prins et Lepic (pourtant fondateurs de la Société anonyme coopérative), Adolphe-Félix Cals ou Stanislas Lépine. Et si l'on connaît Félix Bracquemond on oublie son épouse, Marie, l'une des trois femmes de l'impressionnisme avec Mary Cassatt et Berthe Morisot.
On les néglige parce qu'ils ne sont pas de très grands artistes, parce que leur peinture n'atteint pas le niveau (exceptionnel) de celle de Manet, de Monet, de Degas ou de Cézanne. On néglige aussi les étrangers, parce que l'impressionnisme est une affaire française — pourtant, Nicolae Grigorescu (1838-1907), considéré comme le plus grand peintre roumain, formé à Paris près de Corot et de Daubigny, adepte de la peinture sur le motif, au réalisme mâtiné d'impressionnisme, magnifique portraitiste, mériterait un peu plus de considération. Mais pourquoi l'impressionnisme est-il une affaire française ?
Selon Gaëtan Picon, cela tiendrait à « cette tendance propre au génie français à transformer (pour le meilleur ou pour le pire) les découvertes spontanées et individuelles en un projet réfléchi et commun, le penchant toujours vers la doctrine et vers l'école ». Cela, ajouté à la forte concentration d'artistes à Paris, expliquerait que les Anglais, dominant la peinture de paysage au début du siècle avec Constable (1776-1837), Turner (1775-1851) et Bonington (1801-1828), aient raté ce train de la modernité. Mais rendons-leur justice : leurs oeuvres marquent profondément Monet et Pissarro lors de leur séjour à Londres en 1870.

La postérité

Le mépris amusé ne dure pas. Dès la fin du siècle et au début du suivant, le style impressionniste se répand à l'Est comme à l'Ouest, en France comme aux Etats-Unis, jusqu'à devenir la règle — et même un certain académisme —, alors que les principaux acteurs français, Degas, Monet, Cézanne ou Gauguin, s'en sont depuis longtemps écartés. L'aventure de l'art moderne que ces derniers ont initiée se développe, avec ses mouvements successifs, ses batailles, ses héros. Mais au-delà des influences directes, Manet puis à sa suite les impressionnistes ont profondément bouleversé l'art — il y a un avant et un après. Ils ont fait disparaître la narration (la fiction) au profit de la peinture seule. « L'accent fondamental de la modernité, écrit Gaëtan Picon, n'en demeure pas moins lié à l'absence de toute signification extérieure au visible. » Un siècle après Manet, l'artiste américain Frank Stella ne dit pas autre chose : « Ma peinture est fondée sur cette réalité qu'il n'y a rien d'autre que ce que l'on voit. »
Mais un mouvement inverse, revenant au sujet, à l'histoire, à la glose, se développe au début du XXe siècle. Marcel Duchamp (et son dégoût de la peinture rétinienne) en est à l'origine. Le surréalisme et ses avatars, revenant à un art de l'imaginaire, le confortent. Aujourd'hui, une partie de l'art contemporain s'en nourrit au point que beaucoup d'oeuvres ne tiennent que grâce au discours et aux « significations extérieures ». Elle réclame du commentaire, de l'actualité, de la dénonciation, du social, du politique, de l'indignation, tout ce à quoi l'impressionnisme, en plein bouleversement social et économique, demeura indifférent. Sans doute en souffre-t-il ? Les modes façonnent nos regards. Elles suscitent parfois de la lassitude.
En Normandie, l'été sera impressionniste
Jusqu'au 26 septembre, dans toute la Normandie, se tient la troisième édition du Festival Normandie Impressionniste. De nombreuses expositions sont organisées dans les musées de la région. Ainsi à Rouen, le musée des Beaux-Arts présente « Manet, Renoir, Monet, Morisot... Scènes de la vie impressionniste » (des tableaux montrant l'intimité des peintres, leur famille...) ; au Havre, le musée des Beaux-Arts, sous le titre « Eugène Boudin, L'atelier de la lumière », montre deux cents peintures d'Eugène Boudin ; à Caen, le musée nous fait découvrir l'œuvre de Frits Thaulow (1847-1906), un paysagiste norvégien qui, après avoir découvert l'impressionnisme à Paris en 1874, s'installe en France en 1892 ; à Honfleur, le musée Eugène-Boudin se penche sur la représentation d'« Etre jeune au temps des impressionnistes (1860-1910) » ; à Giverny, le musée des Impressionnismes expose Gustave Caillebotte ; et au musée de Vernon sont montrés des portraits de femmes parmi lesquels figure Marie Bracquemond, l'épouse de Félix.

LE MOUVEMENT IMPRESSIONNISTE (IMPRESSIONNISME)

Claude Monet, La Pie (1868-69)
Monet, La Pie (1868-69)
Nous sommes à la fin du XIXème siècle, en France. Avec l'avènement du Second Empire (1852-1870), Napoléon III, régent hautement autoritaire, a instauré une politique culturelle basée sur l'encensement de la grandeur de l'Empire. Les peintres académiques de l'époque peignent volontiers des scènes bibliques, mythologiques ou emblématiques avec des procédés conventionnels et établis : les contours sont lisses, nets et précis, les variations des couleurs sont douces et atténuées quand elles ne sont pas exacerbées par l'utilisation du clair-obscurPourtant, une poignée d'artistes, issue des classes populaires, va provoquer une rupture artistique en créant un nouvelle façon de peindre qui va fasciner les générations futures : L'impressionnisme"Un matin, l'un de nous manquant de noir, se servit de bleu : l'impressionnisme était né." Auguste Renoir.

L’impressionnisme est donc un courant né dans la seconde moitié du XIXe (1874-1886), et fut un mouvement révolutionnaire à ses débuts du fait de sa modernité jugée parfois "scandaleuse". Ce courant remis en effet en cause les siècles antérieurs de peinture "codifiés", en représentant par exemple le "nu" qui était jusqu’alors totalement rejeté par l’église. Citons par exemple l’oeuvre de Manet "Le déjeuner sur l’herbe" qui représentait une femme nue et qui lui valu l’envoi de son œuvre au Salon des Refusés. Les impressionnistes se caractérisaient donc par leur libre choix des thèmes et ce souhait de reproduire une "impression instantanée", d’où le terme impressionnisme.

Le changement se fait aussi dans l'utilisation de la peinture, ils utilisent une technique qui va donner son nom au mouvement, car les toiles évoquent avant tout une... impression. Ils vont se servir de la juxtaposition des pâtes teintées pour obtenir les teintes (un vert = une touche de jaune déposée sur une couche de bleu) mais aussi les reliefs et les contours. L'ensemble de la peinture n'est que l'accumulation de petites touches de pâtes déposées sur la toile, mais qui donnent des petits mouvements vivants jamais obtenus jusque là, comme si les toiles étaient des champs d'herbes colorées balayées par le vent. Ce sont des peintres de la lumière. Les peintres n’utilisent pas de noir mais plutôt des couleurs claires et souvent pures. Par la juxtaposition de couleurs claires et vibrantes, la reproduction sur la toile d'impressions fugitives, par des traits de brosses rapides et fragmentés, les impressionnistes ont renouvelé leurs sujets. 

Le 15 avril 1874 à lieu la première exposition impressionniste, une trentaine de peintres exposent leurs œuvres dans l'atelier de leur ami, le photographe Félix Tournachon, plus connu sous le pseudonyme Nadar, au 35, boulevard des Capucines. Nombre de ces peintres d'avant-garde ont déjà participé onze ans plus tôt au "Salon des Refusés" autour d'Édouard Manet. L'atelier de Nadar reçoit la visite d'un certain Louis Le Roy, critique du journal Le Charivari. Il ironise sur ces artistes qui se détournent de la manière académique en vogue sous le Second Empire et au début de la IIIe République. Il intitule son article "L'exposition les impressionnistes", d'après le titre d'un tableau de Claude Monet, Impression soleil levant (1872), qui fait partie de l'exposition.

L’Impressionnisme tire donc son nom d’un tableau de MonetImpression soleil levant, peint au Havre en 1872. Cette toile reflète à merveille une manière de peindre qui cherche à saisir l’instant éphémère, qui privilégie la couleur par rapport à la forme et qui laisse l’œil du spectateur recomposer ce que la touche fragmentée du peintre avait dissocié. En choisissant ce tableau pour cible de ses railleries et en qualifiant d’Impressionnistes les adeptes de cette manière de peindre, le critique satirique Louis Leroy n’imaginait pas à quel point il était perspicace : ce faisant, à la fois il révélait la naissance d’un courant pictural en quête de lumière, de plein air et d’impressions fugitives et il témoignait de l’origine géographique de ce mouvement.


Les principaux représentants de l'impressionnisme sont en France : Claude Monet, Pierre-Auguste RenoirCamille PissarroAlfred SisleyPaul CézanneEdgar DegasBerthe MorisotFrédéric Bazille. En Allemagne : Max LiebermannCorinthSlevogt. En Grande-Bretagne : Philip Wilson Steer. En Italie : SegantiniLe mouvement impressionniste proprement dit s'achève en 1886 avec la dernière grande manifestation du groupe. Ce mouvement donne naissance à un autre mouvement, le post-impressionnisme. Il s'étale de 1885 à 1915 et représente le synthétique, le symbolisme. C'est une approche plus scientifique de la peinture.

L'influence de l'Impressionnisme se perpétue ensuite dans le néo-impressionnisme et le pointillisme d'un Seurat ou d'un Signac et marquera notamment l'oeuvre de Vincent Van Gogh, avant d'être dépassée par le fauvisme et l'expressionnisme. Ses principes seront repris au XXe siècle par le tachisme et l'Op'Art. Si l'intérêt du public est aujourd'hui considérable pour la peinture impressionniste, en témoignent les récentes expositions à succès, une littérature abondante et des ventes inédites, il ne faut pas oublier qu'à leur époque, les tableaux du genre apparurent d'une modernité scandaleuse aux yeux de leur contemporains.

"Un matin, l'un de nous manquant de noir, se servit de bleu : l'impressionnisme était né." Auguste Renoir.

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