Léonard de Vinci et la peinture comme oeuvre de connaissance
Présentation
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La Renaissance.
La Renaissance est le nom qu’on donne à la période qui correspond, en Europe, à la sortie du Moyen-âge et qui commence aux environs du 15ème siècle. Comme son nom l’indique, elle figure un retour aux idées de l’Antiquité gréco-romaine, connaît un essor intellectuel extraordinaire et voit naître la science moderne (notamment la physique mécanique de Descartes et de Galilée, la cosmologie de Copernic et de Bruno, l’étude du corps humain, etc.), l’invention des arts libéraux, c’est-à-dire des arts indépendants d’un but utilitaire et élevés au rang de connaissance, comme la peinture (sous la forme nouvelle du tableau) et les théories de la peinture (livres dans lesquels on étudie les règles techniques de la peinture), l’architecture, la statuaire, mais encore le développement de nouvelles techniques sous l’impulsion du développement des sciences, et marque aussi un tournant majeur dans la pensée philosophique. Toutes ces manifestations culturelles, philosophiques, scientifiques, artistiques, techniques, ne doivent cependant pas être considérées indépendamment les unes des autres : elles se produisent au même moment parce qu’elles dépendent toutes les unes des autres. La Renaissance est en effet, bien avant les Lumières, l’apogée du savoir universel. On y estime que l’homme achevé est celui qui, par l’esprit, embrasse l’ensemble du savoir.
La Renaissance ne se déploie cependant pas qu’en Italie, mais encore au Nord, dans l’actuelle Allemagne et au Pays-Bas (dits Provinces Unies), ce qu’en témoignent les Primitifs Flamands (Van Eyck, Van der Weyden, par exemple et notamment) et l’immense artiste allemand Albrecht Dürer.
Léonard de Vinci.
1452-1519
Léonard de Vinci est, comme son nom l’indique, né à Vinci en Italie. Après une éducation sommaire, il devient apprenti dans l’atelier du Verrochio, alors célèbre artiste de la Renaissance italienne, recevant des commandes de la famille Médicis. Verrochio, comme tout artiste de la Renaissance, n’est cependant pas seulement peintre, il est aussi orfèvre, fondeur, sculpteur, forgeron. C’est en son atelier (où le maître distingue rapidement l’élève par ses qualités de dessinateur) que Vinci viendra à parfaire son éducation, en apprenant non seulement la peinture et le dessin, mais encore de nombreuses techniques de tous ordres, et surtout en prenant goût aux sciences, notamment aux mathématiques et à la physique naissante. Dès l’enfance, Vinci se montre grand observateur de la nature, des animaux, des paysages, et ce sens de l’observation, ce goût pour la connaissance de la nature, ont certainement une grande part dans ses qualités de dessinateur. Ce goût pour le savoir, cette recherche de la vérité, son intérêt inaltérable pour les mystères de la nature et l’essor contemporain de la méthode scientifique moderne sont tout entier appliqués dans les tableaux de Vinci. Peut-être devrait-on plutôt dire que ses tableaux sont l’application picturale du goût pour le savoir de leur auteur ou la manifestation picturale de l’esprit rationnel et curieux de la Renaissance.
L’époque, et l’éducation dans l’atelier du Verrochio, conduiront donc Vinci à devenir non seulement un grand peintre, mais surtout un esprit universel. Il est difficile de distinguer chez lui (comme chez nombre d’artistes de la Renaissance) le peintre de l’ingénieur et du scientifique ; car enfin ces diverses activités s’entrecroisent et se compénètrent : la peinture n’est en effet que l’étude picturale des sciences, notamment de l’étude des corps et de la géométrie, exécutée par le moyen de techniques déjà scientifiques et mathématiques. L’exemple le plus frappant de cette participation des sciences aux arts reste, bien évidemment, l’invention de la perspective (mais pas seulement : car avec elle vont aussi l’étude de la proportion des volumes, des couleurs, de la lumière etc.).
Les méthodes pour construire une vue en perspective sont théorisées par l’architecte Alberti (1404-1472). Elles nécessitent une connaissance certaine de la géométrie, des recherches nouvelles sur la vision et l’optique, mais supposent surtout une représentation de l’espace comme homogène, régulier, neutre et géométrique. Cela est tout à fait nouveau au 15ème siècle.
Ce que vise ici l’artiste c’est à connaitre. Connaitre les lois de l’univers, connaitre la nature du corps humain, connaitre les secrets de la création, lui qui devient un nouveau créateur.
Ce que vise l’art de la Renaissance, c’est donc avant tout à connaitre la réalité. C’est un art scientifique. Le peintre est au service de la vérité, de la même manière qu’un philosophe, un physicien ou un cosmologue.
Les dessins anatomiques.
(… )Mais j’ai voulu aussi passionnément connaître et comprendre la nature humaine, savoir ce qu’il y avait à l’intérieur de nos corps. Pour cela, des nuits entières, j’ai disséqué des cadavres, bravant ainsi l’interdiction du pape. (…) Ce que j’ai cherché finalement, à travers tous mes travaux et particulièrement à travers mes peintures, ce que j’ai cherché toute ma vie, c’est à comprendre le mystère de la nature humaine (…)
L. de Vinci, Carnets
L’homme de Vitruve, dessin de 1492, montre les proportions vraies du corps humains. Il est ainsi nommé car il reprend et corrige, selon Vinci, les proportions du corps proposées par un architecte antique du nom de Vitruve. Ce qui frappe dans ce dessin extrait des carnets de Vinci c’est que les proportions du corps humain sont calculées en rapport à des figures géométriques idéales (cercle et carré, figures les plus parfaites), ce qui suppose l’idée que le corps humain, tel qu’il est créé, est une perfection de la nature. Les hommes de la Renaissance sont en effet des admirateurs de la nature et la pensent, comme les hommes de l’antiquité, harmonieuse et toujours parfaitement proportionnée. Ainsi, selon les mots de Galilée, la nature est « un grand livre écrit en langage mathématique » ; le travail du peintre, comme celui du physicien, c’est de retrouver ces proportions mathématiques naturelles. Il s’agit donc, non seulement de recréer la nature, mais encore de percer les mystères de la création divine – car si la nature est ainsi harmonieuse et ordonnée, c’est parce qu’elle est création de Dieu.
Le peintre, et surtout le dessinateur (celui qui retrace la forme des êtres), est celui qui perce les mystères divins, qui comprend les secrets (mathématiques) de la nature. Son travail est en ce sens certes un travail scientifique, mais aussi un travail de création, à l’image de Dieu. Pour la première fois dans l’histoire de l’art, et peut-être de l’Europe, les hommes se pensent comme créateurs, au même titre que Dieu, d’un monde qui leur est propre le monde de l’art et de la beauté, et à travers ce monde aussi du monde humain. C’est la naissance de l’humanisme, pensée qui fait de l’homme le centre de la création et le centre des valeurs. Cela sera mis en « œuvre » dans le célèbre, splendide et dernier autoportrait d’Albrecht Dürer, daté de 1500.
Albrecht Dürer, Autoportrait à la fourrure, 1500
Ainsi, le célèbre dessin d’étude, L’homme de Vitruve, de Vinci est la manifestation de cet esprit savant, libre, audacieux et humaniste de son époque.
Les dessins anatomiques sont des tentatives pour comprendre les muscles, les tendons, les os, les organes du corps humain. Cette compréhension de de l’anatomie permettra ensuite à Vinci de mettre au point une étude du mouvement. Ici, l’art ne fait que servir la connaissance.
Cependant, on peut douter qu’il s’agît là seulement d’imiter la nature, de la reproduire telle qu’elle existe déjà – car quel intérêt aurait un tel art ? On peut suppose qu’il s’agit plutôt, à travers la connaissance de la nature et sa reproduction fidèle, de reproduire le mouvement de production, de création, lui-même. Ainsi, si, comme l’écrit Aristote dans la Physique, « l’art imite la nature », c’est bien plus en ce qu’il produit comme la nature produit qu’en ce qu’il reocpierait les êtres naturels qui existent déjà.
L’immense artiste Albrecht Dürer est le plus parfait illustrateur de cette notion aristotélicienne de la mimesis.
Les machines.
(…) qu’il ne me lise pas, celui qui n’est pas mathématicien, car je le suis toujours dans mes principes (…)
Carnets.
Il n’y a donc rien d’étonnant, sans cependant diminuer le génie de Vinci, à ce que celui-ci fut en même temps ingénieur. Qu’il applique ses principes, son intérêt scientifique, dans la peinture n’aurait su l’empêcher de l’appliquer aussi dans les machines.
Machine volante Machine volante
Machine à puiser l’eau.
Les tableaux.
La dame à l’hermine, 1485
La belle ferronnière, 1490
La Cène,1495
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