Athènes: Histoire de l’Acropole
et du Parthénon
L’Acropole et son Parthénon. Ils se dressent fièrement du haut de leur colline, s’offrant à la vue des visiteurs qui ne peuvent les manquer depuis les rues d’Athènes. Cette merveille d’art et d’architecture construite au Vème siècle avant J.C. semble scintiller sous les rayons brûlants du soleil du mois d’août. La nuit, les éclairages lui donnent également toute l’attention qu’elle mérite. Et pourtant, l’Acropole a subi tant d’outrages qu’elle a bien failli disparaitre. Elle réussit l’exploit de survivre aux affronts du temps et aux tremblements de terre, mais elle ne put résister à l’avidité et la violence des hommes. Elle fut négligée, mutilée et dépouillée jusqu’à la moelle, ne laissant derrière qu’un squelette agonisant. Aujourd’hui, les récentes et brillantes restaurations des archéologues redonnent vie à l’Acropole. Elles lui rendent sa dignité et nous invitent à un voyage dans la Grèce antique, il y a 2500 ans.
L’ancienne Acropole et les guerres
Médiques
Nous sommes en 500 avant notre ère. Athènes entre alors en conflit avec l’empire Perse. Il s’agit des guerres médiques (500-449 avant J.C.) au cours desquelles les Athéniens affrontèrent les Perses lors de la célèbre bataille de Marathon en 490 avant J.C. Une autre bataille décisive eut lieu en 480 avant J.C. Il s’agissait cette fois-ci d’une bataille navale, la bataille de Salamine. Mais lorsque les guerriers athéniens retournèrent dans leur patrie, ce fut pour découvrir leur ville dévastée par l’armée Perse. Les Athéniens avaient en effet été obligés d’abandonner la cité face à l’avancée de l’armée perse.
L’ancienne Acropole mise à sac par les Perses
Athènes possédait alors une Acropole édifiée en haut d’une colline. Il s’agissait d’un ensemble de fortifications qui abritait un temple, dit le ‘Vieux Temple’, dédié à Athéna. Les Grecs y organisaient les Panathénées, des processions de pèlerins vouées au culte d’Athéna, la déesse protectrice de la ville. Tous les quatre ans, étaient également organisées les ‘Grandes Panathénées’ auxquelles s’ajoutaient des concours musicaux et gymniques. Au pied de l’Acropole, s’étendait la prospère ville d’Athènes. Malheureusement, l’Acropole n’échappa pas au sac des Perses menés par le roi Xercès. Les fortifications, le temple et ses précieuses statues, les Korés, furent détruits.
Les Athéniens entreprirent alors de reconstruire à la hâte les fortifications et de restaurer le Vieux Temple. Alors que l’on s’emploie à reconstruire la ville, la lutte contre les Perses continue. Les Perses ne menaçant pas uniquement Athènes mais également les autres cités grecques, une ligue vit le jour sous l’impulsion du stratège Aristide (478 avant notre ère). Il s’agit de la célèbre ligue de Délos. Rapidement, Athènes prit l’ascendant sur les autres cités grecque et exigea un tribut en échange de leur protection. La cité put ainsi s’enrichir. Il va sans dire que cette montée en puissance d’Athènes était loin de plaire aux autres cités, en particulier Sparte. Quoi qu’il en soit, Athènes atteint son apogée au milieu du Vème siècle avant J.C. Elle était alors sous l’influence d’un personnage politique clé de l’histoire d’Athènes, Péricles.
L’Acropole et l’âge d’or d’Athènes sous
Péricles
Athènes sortit enfin victorieuse du conflit avec la Perse, au terme d’une guerre d’une cinquantaine d’années. En 449 avant notre ère, la signature de la paix de Kallias mit fin aux guerres médiques. Par ailleurs, la Paix de Trente ans signée en 446 avant J.C. avec la rivale Sparte permit d’écarter la menace sparte pour un moment. Cette paix temporaire allait permettre à Athènes de se surpasser dans le domaines des arts, de l’architecture, de la culture et de la philosophie.
La vie intellectuelle et artistique se concentrait ainsi à Athènes. Socrate, Thucide, Sophocle, Euripide, les plus grands esprits de la Grèce antique se trouvaient à Athènes. C’est aussi l’essor de la tragédie grecque. Les pièces étaient données dans le théâtre de Dionysos qui s’étend aux pieds de l’Acropole. C’est également l’ère du développement de la démocratie athénienne. Tous les citoyens pouvaient débattre et voter. Ils se réunissaient sur l’Agora d’Athènes, située en contrebas de l’Acropole. Tous? Pas vraiment. Etaient exclus les femmes, les métèques (étrangers), les pauvres, les commerçants, les artisans et les esclaves. C’est dans ce contexte que furent construits l’Acropole et son joyau, le Parthénon.
Symbole du triomphe et de la puissance
d’Athènes
Pericles, puissant et influent homme d’Etat Athénien, entreprit de reconstruire l’Acropole et son Parthénon. Ce nouveau monument se devra d’être encore plus grandiose. Le projet fut soumit au vote démocratique. Le Parthenon sera le symbole de la puissance d’Athènes et du triomphe de la démocratie athénienne sur la barbarie.
Les travaux commencèrent en 447 avant J.C. Chose extraordinaire pour l’époque, il faudra seulement 15 ans aux ouvriers, architectes et artistes grecs pour construire l’un des bâtiment les plus harmonieux et célèbres au monde. Ses proportions quasi parfaites, sa beauté et son élégance allaient faire de ce monument l’un des plus copiés ; de la cour suprême des Etats-Unis à la porte de Brandeburg à Berlin.
Les secrets de construction du Parthénon
Illusion d’optique et géométrie
L’acropole est un ensemble de bâtiments, dont le Parténon. Il est le coeur de l’Acropole. D’une taille exceptionnelle, il fut conçut par les architectes Ictinus et Callicrates. Toute sa beauté réside dans un secret, l’illusion d’optique. Il est un chef d’oeuvre de géométrie et d’ingéniosité. Ses lignes qui se coupent à angle droit paraissent parfaitement droites alors qu’elles sont en réalité incurvées. Quant aux colonnes, si elles paraissent droites, elles sont en fait convexes. Il n’y a en réalité pas une seule ligne droite dans tout l’edifice. Les anciens architectes grecs avaient ainsi compris les grandes lois de l’optique et la manière dont notre cerveau peut parfois interprêter ce qu’il voit.
L’édifice répondait également à des règles de proportions bien précises. On a longtemps cru que les proportions parfaites du parthenon reposaient sur le nombre d’or (1.61). Les archéologues ont néanmoins découvert un autre rapport de proportion, 4 à 9, que l’on retrouve entre les colonnes et la façade. La découverte de la pierre de Salamine sur l’île du même nom, a révélé aux archéologues les différentes unités de mesure utilisées par les Grecs. Elles étaient inspirées du corps humain. Le pied était par exemple une unité de mesure.
L’assemblage des blocs de marbres
Bien sûr, le Parthenon ne serait pas aussi majestueux sans le marbre qui le compose. Cette pierre d’un blanc éclatant, à la fois souple et résistante, fait rayonner le temple. Le principal gisement de marbre de la Grèce antique se trouvait dans les Cyclades. Il aurait cependant été trop couteux de faire venir autant de marbre de si loin. Comme un signe envoyé des dieux, un gisement de marbre fut découvert à seulement quelques kilomètres d’Athènes.
Mais comment les anciens Grecs s’y prenaient-ils pour assembler les immenses blocs de marbres? Comment assemblaient-ils les énormes tambours qui forment les colonnes? Ces colonnes majestueuses n’étaient en effet pas composées d’un seul et même bloc mais de plusieurs tronçons encastrés les un aux autres. La technique des anciens Grecs fut révélées aux archéologues lors des travaux de restauration. Un morceau de cèdre était glissé au coeur des deux tambours, permettant de les joindre. Le tout était tellement hermétique que le bois ne s’est pas décomposé et fut récemment mis au jour par les archéologues. Ce matériaux a par ailleurs l’avantage d’être souple, donnant la flexibilité nécessaire pour résister aux tremblements de terre. Les restaurateurs ont repris la même technique mais avec du titane.
Ainsi, naquit des ruines de l’ancienne Acropole un exceptionnel complexe religieux. Il faut imaginer un bâtiment recouvert de couleurs resplendissantes, bleues et rouges. Au bout de seulement 9 ans, le temple était prêt à accueillir la gigantesque statue d’Athéna, chef d’oeuvre de Phidias.
Le Parthénon, la demeure de la vierge
Le Parthénon, signifiant ‘la demeure de la vierge’, était dédié à Athéna. Le parthenon contenait ainsi une immense statue d’Athéna, réalisée par le grand sculpteur Phidias. Le temple fut construit de manière à offrir la meilleure exposition possible de la statue. De 12 mètres de hauteur, elle était faite d’or et d’ivoire. Sa structure était en bois. Ce fut une statue extrêmement coûteuse non seulement en raison des luxueux matériaux utilisés mais aussi à cause des différents corps de métiers sollicités. Un investissement dénoncé par les opposants de Périclès, arguant que le coût était l’equivalent de 200 navires de guerre. Pour faire taire l’opposition, Périclès répliqua qu’en cas de nécessité absolue, les parties d’or pouvait être démontées et réutilisées à d’autres fins.
Un tel trésor n’a bien sûr pas survécu et la statut a depuis bien longtemps disparu. Des petites reproductions nous permettent en revanche de savoir à quoi elle ressemblait. Elle tenait un bouclier, une niké (déesse de la victoire) et portait un casque supportée par des pégases, les chevaux ailés. Mais la fonction du Parthenon n’était pas purement religieuse. Le temple abritait également une salle au trésor où étaient gardés les fonds de la ligue de Délos.
Ainsi est né l’un des plus extraordinaires bâtiments de l’antiquité. Mais cette oeuvre de génie allait très vite être menacée. L’âge d’or d’Athènes fut aussi rayonnant qu’il fut bref. Il ne dura que 34 ans. Pour l’Acropole, ce fut le début d’une lente agonie entrecoupée de pillages et de destruction.
L’agonie de l’Acropole
La fin de l’âge d’or d’Athènes
En 431 avant notre ère, la rivalité avec Sparte dégénère en une guerre qui sera fatale pour Athènes. C’est la guerre du Péloponèse. Par ailleurs, Péricles mourut en 429 avant J.C. d’une épidémie de peste qui emporta une bonne partie des Athéniens. Par conséquent, la construction des Propylées (entrée de l’acropole) qui avait commencé en 437 ne fut jamais achevée. Malgré tout, entre 421 et 407 avant J.C., d’autres travaux seront exécutés pendant les moments creux du conflit. L’Odéon de Périclès et le temple d’Héphaïstos situé en contrebas de l’Acropole furent ainsi érigés.
En 404 avant J.C., Athènes est défaite par Sparte. Si cela signe la fin de l’âge d’or d’Athènes, ce n’est pas pour autant la fin de la cité. Les Athéniens parvinrent à se relever de cet échec. Les stratèges Conon et Timothéos firent entrer Athènes dans sa deuxième phase d’hégémonie en 378 avant notre ère. Les finances sont redressées. Néanmoins, aucun autre monument ne sera construit.
Bientôt, les Athéniens allaient successivement tomber sous la coupe de deux nouvelles puissances, Alexandre le Grand et l’Empire Romain. Ces derniers ne se priveront pas d’emporter les précieuses statues de l’Acropole. Ainsi commencera un pillage qui se poursuivra jusqu’au XIXème siècle. Par ailleurs, en 267, la ville fut envahie et saccagée par les Hérules, un peuple germanique. Mais une autre puissance, bien plus durable, allait changer le destin de l’Acropole et d’Athènes, le Christianisme.
Montée du Christianisme
Au IVème siècle, l’empereur romain Théodore Ier décréta l’interdiction du culte des dieux païens. Cela signa la fin du règne d’Athéna. Le Parthénon sera désormais un lieu de culte pour la nouvelle vierge, Marie, et son fils. Le Parthénon fut ainsi transformé en église au VIème siècle. Quant aux statues qui n’avaient pas été emportées par les Romains, elles furent emmenées à Constantinople, capitale de l’empire romain d’Orient. La Grèce est désormais intégrée à l’empire Byzantin. Mais lorsque Constantinople est victime du sac des Francs lors de la IVème croisade en 1204, Athènes est en proie à des invasions successives. Entre 1204 et 1456, Catalans, Vénitiens et Florentins laisseront ainsi la trace de leur passage sur les monuments d’Athènes.
L’explosion du Parthenon sous l’occupation turque
Au XVème siècle, le sultan Mehmet II de l’empire Ottoman s’empara de Constantinople (en savoir plus sur le siège de Constantinople en 1453 par les Turcs en cliquant ici). Ce conquérant allait également occuper toute la Grèce. Si le sultan admirait la splendeur de l’Acropole, il comprit également la valeur militaire qu’elle représentait avec ses fortifications. Mehmet II en fit ainsi une garnison et imposa au Parthénon son deuxième changement de religion. Il devint une mosquée. La cloche rajoutée au Parthénon sous l’ère chrétienne fut transformée en minaret. Un harem fut même installé dans l’ancien temple Erechthrum.
Malgré toutes ces transformations, le Parthénon se dressait encore dans toute sa splendeur et faisait l’admiration des voyageurs qui s’aventuraient jusqu’à Athènes au XVIIème siècle. Mais tout bascula en 1687. Une guerre entre la République de Venise et l’empire Ottoman allait détruire ce précieux bâtiment qui était parvenu à traverser mille ans d’histoire.
En 1687 les troupes vénitiennes entamèrent le siège d’Athènes. Pensant à tort que des Chrétiens n’oseraient s’en prendre à un bâtiment qui était autrefois une célèbre église, les Turcs stockèrent leur réserve de poudre à canon dans le Parthénon et envoyèrent femmes et enfants s’y réfugier. Ce fut une dramatique erreur. Le général vénitien, un Suédois nommé Otto Wilhelm Königsmarck, fit subir à l’Acropole un bombardement sans pitié. Le soir du 26 septembre 1687, un obus d’artillerie transperça le toit du Parthenon où était entreposée la poudre à canon. L’explosion fut monstrueuse. 300 personnes furent tuées. Quant au bâtiment, il offrait un spectacle de désolation. Le toit s’était effondré, la partie centrale et de nombreuses statues furent détruites. Les Vénitiens s’emparèrent de la ville deux jours plus tard, pour finalement l’abandonner quelques mois plus tard. Il était en effet trop couteux de maintenir la défense d’Athènes. Les Vénitiens quittèrent la ville mais non sans avoir pillé le Parthénon au préalable et emporté des pièces du temple à Venise.
Pillages au XIXème, le coup de grace
Au XIXème siècle, un Lord écossais, Thomas Bruce Elgin, entreprit de piller le monument. Avec l’autorisation du pouvoir turc, il fit arracher les métopes du Parthénon (plaques à reliefs, elles représentaient des scènes de la mythologie grecque) et les envoya en Angleterre. Ils se trouvent aujourd’hui encore au British Museum.
Le nouveau souffle de l’Acropole
La restauration du Parthenon
Il fallut aux anciens Grecs moins de 9 ans pour construire le Parthénon. Aujourd’hui, les travaux de restauration durent depuis 30 ans, malgré les technologies modernes. La tâche qui attendait les restaurateurs était en effet ardue. Les archéologues durent d’abord cataloguer et organiser les milliers de fragments de pierre qui jonchaient le sol de l’Acropole. Il y en avait plus de 100 000, soit un monstrueux puzzle aux pièces pouvant peser jusqu’à plusieurs tonnes.
Par ailleurs, les restaurateurs durent faire face à une autre difficulté. Au début du XXème siècle, le Parthénon avait déjà été restauré. Malheureusement, les restaurateurs de l’époque utilisèrent des crampons de fer pour assembler les pièces. En rouillant, le fer ravagea le marbre. Les anciens avaient également utilisé du fer, mais ils l’avaient enduit de plomb. Ce matériau permet de lutter contre la rouille et est en plus très malléable et flexible. En outre, les blocs ne furent pas correctement assemblés. Or aucun bloc n’est interchangeable, chacun remplit une fonction precise.
Les restaurateurs durent donc réparer les dégâts avant d’entamer les travaux. Ils durent aussi traiter un autre problème. Certaines pièces manquantes ne furent jamais retrouvées. Du marbre fut donc ajouté pour les parties manquantes. Ce marbre se repère aisément puisqu’il est beaucoup plus blanc que les autres pièces de marbre plus anciennes.
Grâce à ces travaux de restauration, l’Acropole fait aujourd’hui revivre l’histoire d’Athènes et de son âge d’or au Vème siècle. Cette Athènes de Périclès où naquirent les prémices de nos démocraties modernes. La ville d’Athènes s’étend toujours aux pieds du Parthénon. Une ville moderne, pleine de vie qui ne perd jamais de vue ce fantastique monument au glorieux passé.
Pour en savoir plus:
- ‘L’Acropole et son nouveau musée‘, Konstantinos Tsakos
- ‘Les secrets du PARTHENON’, Série ‘les Monuments Eternels’, Arte France
- ‘Parthenon, the glory of Athens‘, National Geographic History, October / November 2015
- ‘L’âge d’or d’Athènes‘, Historia, mensuel N°776 daté août 2011
Je vous recommande également de visiter le superbe Musée de l’Acropole.
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