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jeudi 19 mars 2020

3. VIVALDI







Vivaldi, vous avez dit... 

opéras ?


Le 21 Mai 2019








Vivaldi et sa perruque masquant ses cheveux roux
L'italien Antonio Vivaldi (1678-1741), qui naquit au sein de la République de Venise et mourut à Vienne dans le cadre du Saint-Empire romain, fut ce compositeur et virtuose du violon et prêtre catholique - surnommé "Il Preto Rosso" (ou "Le Prêtre roux"), en raison de la couleur naturelle de ses cheveux, est, comme on le sait, l'un des plus connus parmi les musiciens de l'époque dite "baroque". Il est d'ailleurs célèbre bien au-delà des milieux férus de musique classique (ou "savante") en général. En effet, qui n'a pas déjà écouté depuis bien longtemps, en se déplaçant en voiture (sur Radio Classique ou France Musique), ses célébrissimes concertos des "Quatre Saisons", ainsi que, mais d'une oreille moins attentive, l'un de ses très nombreux concertos écrits pour une grande diversité d'instruments ? Mais, une certaine forme de gloire, due à une partition (ou à un ensemble de pages), auprès du public le plus large, peut contribuer à occulter des aspects très importants d'une œuvre ;  et ce fut le cas pour Vivaldi... Il est vrai que celui-ci composa plusieurs centaines de concertos, ce qui fit dire au compositeur Igor Stravinski  - avec une part de malice, mais aussi de sarcasme - que le vénitien avait composé "600 fois le même concerto"... Or, rien n'est plus faux, ou du moins tout dépend de quoi l'on veut parler. Ce qui est vrai, c'est que Vivaldi privilégia toujours les couleurs, la mélodie, ainsi que le rythme (il disait souvent qu'il lui fallait "moins de temps pour composer un concerto que pour un copiste de le noter"), au détriment de l'art du contrepoint ; d'où cette fausse impression de non-renouvellement. Mais, le plus dommage dans cette affaire, ce fut que tous les autres pans de l'oeuvre immense de Vivaldi furent occultés pendant le XIXe siècle et la première moitié du XXe siècle (et même au-delà), notamment dans les domaines de l'opéra et de la musique sacrée. Dans cet article, c'est  donc d'opéra dont il s'agit ; alors, que dire à propos des opéras vivaldiens ?
La redécouverte des opéras de Vivaldi commença dès le début de la décennie 1970 (avec par exemple le pionnier que fut le chef d'orchestre italien Claudio Scimone - 1934-2018 - et son ensemble I Solisti Veneti). Puis, ce mouvement s'affirma de plus en plus, en fonction des recherches accomplies dans des bibliothèques universitaires (et autres), avec, à partir des années qui suivirent, ce qui se produisit dans le domaine de la "révolution baroqueuse". J'ajoute que, très rapidement, les interprétations que l'on donna des opéras vivaldiens (et pour les compositeurs de musique baroque en général) se fit sur instruments anciens. Les chefs "baroqueux" voulurent également mettre en valeur les voix de ces chanteurs solistes, qui devinrent de plus en plus à la mode (et assez nombreux), les contreténors (à la tessiture - non "naturelle" - d'alto), afin d'approcher le plus possible de ce qu'avait été "l'art des castrats" italiens aux XVIIe-XVIIIe siècles. Cet art du chant, dont le public venait écouter les performances, quasi-uniquement pour les projections vocales des stars de l'art lyrique , explique le fait que, comme ce fut généralement le cas pour les opéras de l'époque baroque, le contenu des livrets ait été peu intéressant, avec des histoires souvent répétées de nymphes, de bergers, de divinités antiques, etc... On se trouvait bien sûr à mille lieux de la qualité littéraire et dramatique de ce que deviendraient par exemple les contenus des drames wagnériens de la seconde moitié du XIXe siècle... Au total, en près d'une cinquantaine d'années, les "baroqueux" nous firent connaître des dizaines d'opéras composés par Vivaldi, qui furent montés sur scène et enregistrés sur disques ; ce qui fut facilité par la vogue (déjà signalée) d'un public assez large envers la tessiture des voix de contreténors ou de très rares sopranistes naturels...
Vivaldi n'aborda pour la première fois le domaine de l'opéra qu'à partir de l'année 1713 (il avait alors trente-cinq ans). Or, il faut savoir que l'art lyrique était la grande affaire de tout compositeur de renom dans l'Italie du début du XVIIIe siècle. Le compositeur lui-même disait avoir écrit et créé près de 100 opéras... Si un certain nombre de ces derniers ont été perdus, parmi les quelques dizaines que l'on peut trouver aujourd'hui en coffret CD (ou en DVD et Blu-ray), je citerais, pour une première approche, et dans l'ordre chronologique des compositions et créations, avec un exemple d'interprétation par cas : "Tito Manlio" (1719), par l'Accademia Bizantina, sous la direction d'Ottavio (réédité en 2017) ; "La Verita in cimento" (1720), par l'Ensemble Matheus, sous la direction de Jean-Christophe Spinosi (publié en 2003) ; "Ercole sul Termodonte" (1723), par Europa Galante, sous la direction de Fabio Biondi (publié en 2015) ; "Dorilla in Tempe" (1726), par I Barrochisti, sous la direction de Diego Fasolis (publié en 2017) ; "Orlando furioso" (1727), par I Solisti Veneti, sous la direction de Claudio Scimone (publié en 1977) ; "Farnace" (1727), par I Barrochisti, sous la direction de Diego Fasolis (publié en 2011) ; "L'Olimpiade" (1734), par le Concerto Italiano, sous la direction de Rinaldo Alessandrini (publié en 2002) ; "La Griselda" (1735), par l'Ensemble Mattheus, sous la direction de Jean-Christophe Spinosi (publié en 2006) ; "Bajazet" (1735), par Europa Galante, sous la direction de Fabio Biondi (publié en 2005) ; et bien d'autres encore...
Je vous propose d'écouter à présent trois extraits issus de certains de ces opéras composés par Antonio Vivaldi... Extrait 1 : "L'Ouverture" de "Orlando furioso", d'un rythme, d'un mélodisme, et d'une fluidité très affirmés...https://www.youtube.com/watch?v=5r_sDaLGivU Extrait 2 : "Agitata da due venti" de "La Griselda", un air (ou aria) devenu assez célèbre depuis une dizaine d'années, habillé par le "chant fleuri" (ou les "fioritures"), ici interprété par la mezzo-soprano américaine Vivica Genaux...https://www.youtube.com/watch?v=dtAYymNK4LY Extrait 3 : "Piangero" de "Orlando furioso", un autre air (aria), mis en valeur par le contreténor Philippe Jaroussky, qui nous fait ressentir les extraordinaires progrès techniques réalisés par ce type de tessiture - depuis l'époque d'Alfred Deller et James Bowman -, dont le timbre est devenu d'une déconcertante facilité et la tessiture proche de ce que représentait celle des castrats italiens du type du napolitain d'origine qu'avait été le célèbre Farinelli... https://www.youtube.com/watch?v=YJoalfIaOz0

La primavera

20032008
La primavera dans Musique primavera
 Accueillons ce premier jour de printemps comme il se doit, avec la légèreté, la grâce, la délicatesse et la gaieté qui sont siennes, même si je n’aperçois que des nuages gris depuis ma fenêtre. Et quoi de mieux que de le célébrer avec l’un des musiques les plus populaires (popularisées à outrance, surtout, voire prostituées !) de tous les temps : le printemps d’Antonio Vivaldi (rv 26). Ecoutons, ou réécoutons plutôt avec une oreille nouvelle, ce chef-d’oeuvre musical intemporel, ou presque.
Il y a tant de choses à dire qu’il m’est difficile de savoir par où commencer.
Les célèbres Quatre saisons sont les concerti qui ouvrent son 8e opus (recueil ; 1725), Il cimento dell’armonico e dell’invenzione (je lui consacrerai un micro article un jour). Déjà, arrêtons-nous quelques instants sur le titre. Tout s’y trouve : le « combat » (je n’aime pas trop cette traduction mais le mot est difficile à rendre en français ; il s’agit de l’interaction, de la rencontre physiquement éprouvante, voire, en exagérant un peu, du clash) entre l’ »harmonie » et l’ »invention », deux termes difficilement conciliables. Vivaldi, enrichi de son expérience de compositeur d’opéras, connaît bien les sensibilités du public et ses attentes ; il sait lui faire ressentir la joie, l’inquiétude ; transcrire le sommeil, le réconfort, etc. Et comme si nous étions incapables de comprendre sa musique (à moins que ce ne soient les musiciens qui sont priés de l’interpréter correctemment), Vivaldi joint à ses quatre concerti des sonnets, une aide précieuse afin de saisir les nuances de sa musique.
Autre remarque importante avant d’entamer l’analyse proprement dite, concernant le style du Vénitien cette fois : la musique baroque est une musique de contrastes. Ceux-ci peuvent s’illustrer de différentes manières : lent/rapide ; grave/aïgu ; soli (solo)/tutti (ensemble de l’orchestre), etc. Vivaldi va, tout au long de sa carrière, adopter une structure pour ses concerti qu’il ne variera qu’occasionnelement : vif (1er mouvement) – lent (2e mvt) – vif (3e mvt). Au sein de ces mouvements, il va opposer la mélodie (en tutti) à l’instrument soliste (le violon, le plus souvent).
Tout cela semble assez théorique et difficilemment compréhensible. Tâchons de le comprendre en regardant de plus près son premier concerto, la primavera, cette succession de trois tableaux.
I. mouvement I : allegro
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  • [0:08] Les premières mesures (ta-ta ta-ta ta-ta-ta) sont, sans doute aucun, les plus célèbres du compositeur. Il s’agit de la mélodie, s’identifiant au printemps et à la gaieté (ou pourrait les assimiler). Cette phrase sera toujours jouée en tutti (ensemble de l’effectif). « Voici le printemps » nous dit Vivaldi… On ne peut plus explicite !
  • [0:37] « …que, gaiement, les oiseaux accueillent de leur chant. » : ce sont les violons solos qui sont sollicités cette fois : un premier oiseau chante, puis, un second le rejoint. Une écoute plus attentive permettrait d’identifier les différentes espèces d’oiseaux. A ce titre, la comparaison avec d’autres de ses concerti, le rossignol ou le chardonneret, pourrait s’avérer très intéressante.
  • [1:13] Mélodie du printemps.
  • [1:20] « Les sources, au souffle des zéphyrs, s’écoulent dans un doux murmure. » : la musique exprime une source qui jaillit, dans un mouvement « rond », sur laquelle vient se poser un vent léger (les violons). A comparer également avec un passage du Hor che’l ciel e la terra de Monteverdi.
  • [1:43] Mélodie
  • [1:50] La mélodie n’a qu’à peine le temps de s’achever que les vents menaçant et le tonnerre grondent « Revêtant le ciel d’un manteau noir, surviennent des éclairs et le tonnerre, tels des messagers. » Le violon soliste est utilisé cette fois pour illustrer les éclairs alors la contre-basse raisonne en tonnerre. Les violons se hâtent alors que les oiseaux se mettent à paniquer.
  • [2:15] Mélodie, toute en nuance, comme un peu craintive et saisie par les évènements qui viennent de se produire.
  • [2:23] Les oiseaux se calment et reprennent leurs chants, doucement. Nous sommes loin de l’unisson qui célébrait la venue du printemps ! « Puis, quand le calme revient, les oiseaux entonnent à nouveau leurs chants harmonieux. »
  • [2:41] Cette fois-ci c’est une mélodie aguerrie de l’expérience qui s’exprime. Elle est sage, beaucoup plus posée et un peu moins pétillante qu’au début. On pourrait même aller jusqu’à dire qu’elle est empreinte d’un certain fatalisme.
  • [2:53] Toutefois, cela ne laisse pas les oiseaux indéfférents qui chantent à nouveau gaiement. C’est également l’occasion pour le soliste de briller une dernière fois.
  • [3:04] Mélodie finale.
Le combat entre l’harmonie et l’invention a bien eu lieu…

II. mouvement II : largo
« Alors, dans les belles prairies fleuries,
bercé par le bruissement des feuilles,
le berger s’endort, son fidèle chien à ses côtés. »
Tout est dit je crois. Quelle poésie ! Et prenons-nous au jeu : imaginons la scène. Le berge sommeille : la musique est lente et respire ; elle s’étire, s’attarde, baille presque. Elle l’empêche de se lever et il n’en a nullement envie. Le berger, avec un large chapeau en paille, est assis contre un arbre ou couché dans la prairie verte, mâchonnant une herbe. Il profite du temps ensoleillé, même s’il est encore un peu frais. Il vit et se sent vivre. Un vent léger le rafraîchit et emporte avec lui des pétales de fleurs. On croierait qu’il neige tellement il y en a. A ses côtés, son chien surveille le troupeau et aboie lorsqu’un des moutons s’en écarte (les deux notes régulières qui ponctuent tout le mouvement).
Je l’envie…

III. mouvement III : allegro
  »Au son joyeux de la musette champêtre,
nymphes et berges dansent sous la voûte céleste
car le printemps resplendit de tout son éclat. »
Dès les premières mesures, le ton est donné. Comme souvent chez Vivaldi, le troisème mouvement est plutôt dansant. A la quiétude d’une longue sièste d’après-midi succèdent les réjouissances et les danses de fin d’après-midis encore claires, alors que les jours ralongent sensiblement.
Ici, le tutti pourrait exprimer la liesse populaire et les farandoles, tandis que les violons attirent notre attention sur les nymphes qui dansent et soutillent, se tenant la main. Quelle élégance ! Quelle harmonie ! Mais… qu’entends-je [6:10] ? Le violon, là, qui joue en solo… ne serait-ce pas un berger qui a abusé du vin et qui titube ? Retour à la liesse. Et puis prenez-vous au jeu ! Fermer les yeux et imaginez-vous danser avec eux, heureux, sans vous soucier du lendemain !
PATER J.-B.-J., Foire de Bezons, Metropolitan Museum of Art, New York

Chef-d’oeuvres absolus, tantôt vulgarisés, tantôt vénérés, les Quatre Saisons méritent d’être dépoussiérées et réhabilitées. Le compositeur considérait ce recueil comme son testament. C’est assurément, aujourd’hui, ses oeuvres les plus populaires, à juste titre.

Petite orientation discographique :
  • La version proposée ici est celle avec Amandine Beyer comme soliste, parue chez l’éditeur Zig-Zag Territoires (2008).
  • Une autre référence demeure celle de Fabio Biondi et de l’Europa galante, vivaldibiondi dans Printempsenregistrée en 1991. Pourtant, force est de constater qu’elle n’a pas pris une ride ! Un grand, très grand enregistrement que celui-ci ! (oubliez celui qu’il a enregistré chez Virgin où il « zappe » complètement la poétique de l’oeuvre). Chez Opus 111, plusieurs rééditions (ça vous évitera cette vilaine pochette kitche) disponibles à 8€ environ. On le trouve très facilement en seconde main également.
  • Ma version favorite demeure celle enregistrée par Carmignola et Marcon, vivaldicarmignola dans Vivaldichez Sony. Contrairement à l’album cité ci-devant, l’Italien s’attèle surtout à rendre la musique descriptive afin de mettre en valeur les sonnets. Splendide ! Réédité sous forme de coffret deux disques, à 13 €. L’autre version qu’il a enregistrée, fort bonne dans l’ensemble mais qui n’atteint pas, pour moi, la beauté de celle éditée chez Sony, a été rééditée chez Brilliant, avec deux autres disques, dans un coffret à prix tout petit.
  • Enfin, autre version intéressante : celle d’Alessandrini, un habitué du répertoire vivaldien.

C’est presque malheureux qu’il me faut terminer cet article, frustré de ne pas avoir pu en dire davantage. L’analyse en profondeur de ces oeuvres, une réflexion plus globale sur les images choisies par le compositeur, la mise en parallèle avec des tableaux et des poèmes, voire des photos, voilà un projet que je nourris depuis longtemps ! Je ne le traîte ici que sporadiquement – hélas ! (je manque de temps également) – mais je gage que je serai amené à en reparler bientôt, le 21 juin au plus tard !=============================================================
Antonio Vivaldi, Concerto per 2 violino la-minor RV523, orchestra Il Pomo d’Oro. Riccardo Minasi and Dmitry Sinkovsky, (violino) Disques Naives 2013
Violent comme il faut, tendre quand c’est nécessaire, passionné toujours mais si souvent réservé aussi, Vivaldi m’accompagne depuis l’enfance, il ne m’a jamais quitté même quand je lui étais infidèle.
Il a su se métamorphoser au fil des ans, autrefois engoncé dans la graisse des orchestres bedonnant et modernes hérités du romantisme, il s’est aminci sous les archets des violonistes baroques et au bout des doigts de clavecinistes de génie, Leonhart, Alessandrini, il s’est remis à danser dans les années 80 et a appris la colère dans les années 90, il a appris à se calmer parfois pour mieux s’emporter souvent dans les années 2000, et le revoilà encore plus surprenant que jamais, amoureux jusqu’au bout, extrême et emporté, et puis latin ensoleillé, baigné dans la lumière de la Méditerranée mais prisonnier de cette église dans laquelle il étouffait, et révolté, trouvant dans la musique ce vent du large et cet appel auquel tout le refusait. Que serait-il si je ne l’écoutais pas, si je l’abandonnais. lui, il ne m’a jamais abandonné, il a bercé mes solitudes, il a écouté mes maux avec tendresse, toujours, et dans le creux de ces interprétations si pesantes du temps de mon enfance, déjà je sentais le frère, l’ami, le confident, l’amant, mon double autre et semblable.
Vivaldi, tel qu’il resurgit de nos jours, par la grâce de cette intégrale de quelques centaines de concertos et opéras que Naïve© a décidé d’entreprendre il y a 10 ans maintenant, et qui ne s’arrête pas, comment pourrais-je en finir avec ce génie modeste, ce prêtre aux cheveux roux si souvent malade quand on l’éloignait de la musique.
Vivaldi, dont l’âme est comme ressuscitée dans cette interprétation sortie il y a à peine une semaine et dont je ne parviens pas, encore une fois, à me passer. Elle me réchauffe. Elle me donne du sens.http://madjidbenchikh.fr/mon-grand-amour-antonio-vivaldi/
ANTONIO VIVALDI
I COLORI DELL’OMBRA
OPHÉLIE GAILLARD – 
cello & musical direction
PULCINELLA ORCHESTRA
Après un double disque consacré à Boccherini salué par la critique, Ophélie Gaillard et le Pulcinella Orchestra nous entraînent à la découverte de l’incroyable palette sonore de Vivaldi, le plus génial des compositeurs vénitiens. 
Sortie le 20 mars 2020 | Label Aparté


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