L’art de la Renaissance
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Fra Angelico, un peintre gothique ou de la Renaissance ?
Publié le : 22/08/2019 08:58:40
Catégories : Articles religieux, objets monastiques
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Le nombre d'oeuvres et de peintures qui nous restent de Fra Angelico est assez important au point de donner la possibilité de dévoiler le secret de cet artiste hors normes. Fra Angelico, avant d'être un peintre, est un religieux dominicain, voué à la prédication. Ainsi sa peinture est comme une prédication où il rend visible l'invisible contemplé. L'oeuvre de Fra Angelico se situe entre deux mondes : celui de l'art gothique finissant et celui de la peinture renaissance qui émerge, avec la perspective et un plus grand réalisme.
La peinture gothique
Fra Angelico est un héritier de la peinture gothique, qui est un mouvement venu de France et qui se développe en Italie entre 1380 et 1450. Ce style de peinture apporte un raffinement de la polychromie qui n'a jamais été poussé aussi loin. Ce raffinement est sans doute dû au souci qui les habitait, celui de représenter la lumière, d'où ces fonds couleur or, ces dégradés de couleurs, ces couleurs vives. C'est aussi une élégance formelle apportée à la ligne. L'art gothique finissant n'ignorait pas totalement la perspective, comme en témoigne les oeuvres de Giotto (1267 - 1337) dont Fra Angelico est en partie un héritier.
Apports de l'art de la Renaissance
Avec la renaissance les principes de la perspective explicités par Leon Battista Alberti (1404 - 1472) dans son traité "De pictural", deviennent le nouveau dogme pictural qui théorise la construction du tableau avec la ligne d'horizon et le fameux point de fuite, à partir duquel on trace toutes les obliques. Une autre caractéristique de cette peinture, c'est un plus grand réalisme, même si cette préoccupation n'était pas absente dans l'art gothique.
Fra Angelico entre l'art gothique et l'art renaissance
Fra Angelico ne refuse pas cette modernité, mais il l'intègre comme un moyen et non comme une fin. Fra Angelico conjugue les richesses du gothique aux nouveautés de la perspective, mais il surplombe le tout en gardant sa voie propre.
Les historiens de l'art ont discuté souvent de savoir si Fra Angelico est un artiste de l'art gothique ou de la Renaissance . Pour aborder ce problème, il ne faut jamais oublier ce qu'il y a de fondamental dans Fra Angelico et d'abord à ses propres yeux.
Fra Angelico un dominicain fervent
Certes il est un très grand peintre, mais aussi et avant tout un religieux exemplaire d’un ordre alors en pleine vitalité, celui des Frères Prêcheurs, récemment réformé par saint Dominique (Giovanni Dominici, 1357 - 1419) selon l'esprit de sainte Catherine de Sienne (1347 - 1380).
Un défi à relever pour Fra Angelico
Les problèmes qui se posent d’abord à Fra Angelico, et auxquels il lui faut trouver une solution, concernent les rapports délicats entre l’Église et la Renaissance, entre la doctrine et l’esthétique d’une tradition catholique millénaire et celles d’un essor nouveau de la culture laïque. C’est précisément sous cet angle que la personnalité historique et artistique de Fra Angelico apparaît dans toute sa netteté.
Un art au service de l'apostolat
Giulio Carlo Argan, critique d'art italien, (1909 - 1992) a fort bien souligné les éléments fondamentaux et proprement « dominicains » d’un tel art, à base doctrinaire, chargé d’une visible intention d’apostolat. La beauté naturelle et son expression artistique sont considérées comme devant mener à Dieu, à travers un processus à la fois intellectuel (remonter des effets à la cause) et moral (choix du bien et élimination du mal). C’est le beau idéal que poursuit Fra Angelico. Il recherche en chaque chose une signification symbolique : ainsi les fleurs seront le symbole du jardin céleste. Il épure le naturalisme en éliminant les aspects du « mal ». La perspective et le clair-obscur de la Renaissance, construits sur des bases quasi mathématiques et centrés sur la raison humaine, seront remplacés par la valeur qualitative de la lumière, chère à l’esthétique et à la métaphysique du Moyen Age, et considérée comme une émanation divine. Et l’artiste aboutit en définitive non à la « vue » objective, mais à la « vision » lumineuse qui sublimise le monde et lui restitue l’aspect de l’Eden primitif.
La modernité et Fra Angelico
Cependant, le modernisme de l’Angelico coïncide par ailleurs avec le plus pur modernisme de la Renaissance, par exemple dans sa conception de l’histoire qui est représentée, en peinture, d’après l’action. Pour les artistes de la Renaissance, celle-ci est un but en soi, dans le choc des volontés, au milieu d’un contexte terrestre et limité.
Ne jamais oublier la fin ultime de l'homme
Mais pour Fra Angelico, tout est ordonné d’avance, orienté vers les fins dernières : il évoque les sujets et les récits bibliques et religieux avec émerveillement, comme s’il s’agissait d’une représentation sacrée; c’est sans doute pour cette raison que tous les « méchants » ont l’air d’être déguisés.
Au delà du naturel, le surnaturel
Il peut être proposé une explication de l’art de Fra Angelico, où l’on verrait déjà, au moins de façon embryonnaire, un « art d’église », distinct de l’art laïc, et précurseur de celui que verra naître la Contre-Réforme. Obéissant à une sorte d’autocritique, Fra Angelico relègue par exemple les scènes d’histoire et d’action, si abondamment préconisées en peinture par Leon Battista Alberti (1404 - 1472), au format minimum de la prédelle (partie inférieure d'un retable polyptyque, développée horizontalement, qui sert de support aux panneaux principaux) ; sauf dans les fresques tardives du Vatican, exécutées pour un pape humaniste, il évite ces sujets dans les œuvres grandeur nature, qui ont au contraire une force de contemplation pour ainsi dire statique.
Un art respectueux de la vertu
Il écarte aussi les thèmes sacrés pouvant inciter à une interprétation « ad libidinem » tels que les Histoires d’Adam et Eve, l’Ivresse de Noé, les Enfers, représentés dans des peintures de vastes dimensions. Cependant, le rôle essentiel que se propose cette autocritique — sans doute sans programme clairement explicite mais née d’une intuition très cohérente — est de ne pas se laisser envelopper et absorber complètement par le système laïque et scientifique d’un art nouveau. C’est ce qui explique l’absence volontaire de tout système chez l’Angelico, son naturalisme imparfait, son refus manifeste de tout approfondissement excessif des lois de la perspective et de l’anatomie, son éloignement conscient d’une psychologie qui ne soit pas pieuse et paisible.
Fra Angelico portait son regard au delà du monde visible ; et s'il semblait renoncer en partie au réalisme de la chair ou de la nature, c'est pour mettre en valeur le réalisme spirituel ou surnaturel.
On pourrait conclure en citant le Père Fausto Sbaffoni qui, en 2010, résidait au couvent saint Marc de Florence : "les historiens de l'art peuvent débattre à l'infini pour savoir si Fra Angelico est gothique tardif ou un peintre de la Renaissance, c'est pour moi une perte de temps. le bienheureux Angelico est surtout l'unique artiste qui ait su transmettre à ce point, en Occident, une spiritualité picturale. Quand les peintres sont libérés de l'influence byzantine, allant vers plus de réalisme. Fra Angelico fut réaliste lui aussi dans son art. Mais il y avait une différence majeure entre lui et les autres artistes : sa vie en Dieu, qui est l'âme même de son art."
La renaissance, c'est le réalisme de la chair, de la nature, alors que Fra Angelico c'est le réalisme de l'esprit, du spirituel.
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bienheureux Fra Angelico, un peintre de talent
Publié le : 30/05/2019 09:49:19
Catégories : Articles religieux, objets monastiques
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Sur notre boutique religieuse nous proposons des icônes ou diptyques qui reprennent des oeuvres du bienheureux Fra Angelico, un religieux dominicain et peintre de talent du XIV-XVème siècle, qui sut allier peinture et contemplation des choses divines ; bien plus son art fut comme un moyen de transmettre aux hommes ce qu'il avait contemplé à l'ombre et dans le silence du cloître. Pour mieux apprécier son oeuvre essayons de pénétrer le secret de sa vie. Commençons par quelques données biographiques.
Jeunesse de Fra Angelico
Le Bienheureux Fra Angelico s'appelait Guido Di Pietro. Il eut au moins un frère et une soeur. La date de sa naissance doit être fixée selon toute vraisemblance en 1387. Tandis qu'il était encore en bas âge, sa famille se fixa à Florence, à un moment où les arts sont florissants. Ainsi, encore jeune, Guido put s'initier à l'art de la peinture et de la miniature dans un lieu privilégié, auprès d'un maître incontesté, Lorenzo Monaco, un moine camaldule, qui dirigeait la plus considérable école d'enluminure et de peinture sur bois de la ville.
Vers la vie religieuse
Mais à la même époque il subit une autre influence, qui allait orienter toute sa vie, celle des disciples de la sainte réformatrice dominicaine Catherine de Sienne, décédée en 1380. Ces disciples tentaient alors de ramener les ordres monastiques à une plus grande observance. Dans la ligne de ce mouvement, le dominicain Giovanni Domini fonda en 1406 un monastère de stricte observance, sur les collines de Fiesole à quelques kilomètres de Florence.
Fra Angelico, jeune dominicain
C'est là que Guido entra en 1407, prit l'habit des dominicains et devient Fra Giovanni. A cette époque l'Eglise était troublée par le grand schisme et les dominicains avaient pris partie pour le pape de Rome Grégoire XII. Pour fuir la persécution des partisans de l'antipape, ils durent s'enfuir de Fiesole et se réfugièrent à Foligno, où ils y demeurèrent huit années. Fra Giovanni fut probablement ordonné prêtre durant cet exil en 1412. C'est là aussi qu'on trouve sa première oeuvre de celles qui nous sont restées : une fresque qui représente saint Pierre martyr, qui fut en 1252 le premier martyr dominicain.
Fra Angelico à Florence
Le 11 novembre 1417 avec l'élection de Martin V prit fin le grand schisme. Progressivement les frères exilés à Foligno se rapprochèrent de Florence. Mais les frères ne purent pas revenir directement à Fiesole et durent s'installer à Florence, au couvent Santa Maria Novella. Durant ce séjour de trois ans, Fra Angelico réalisa plusieurs peintures pour différentes églises ou monastères. Le laps de temps entre la commande passée et le paiement final témoigne d'une rapidité d'exécution qui restera toujours sa marque, preuve d'une très grande sûreté dans la conception de ses oeuvres.
En 1420 Fra Angelico put revenir à Fiesole. En plus de son travail d'enluminure, il décora son propre couvent et les autres églises de Fiesole. Fra Angelico était devenu un maître et il possédait une importante école qui lui permettait de répondre aux différentes demandes.
La spiritualité dans l'art pour Fra Angelico
L'oeuvre de Fra Angelico est plus ancrée dans la réalité humaine que celle, souvent très idéalisée et très statique, de ses prédécesseurs, et à la fois beaucoup plus immatérielle. Pour lui, rendre gloire à la nature spirituelle du réel ne signifie pas tourner le dos au réalisme, mais au contraire le magnifier. A cette époque vivait dans le même couvent un certain Antonino Pierozzi, qui deviendra saint Antonin en 1523. Fra Angelico dut bénéficier des idées d'Antonin sur l'art sacré : "La beauté des créatures mène à la connaissance du créateur" et les images religieuses n'ont pas d'intérêt "en et par elles-mêmes, mais parce qu'elles amènent le fidèle à dépasser la représentation de l'objet de culte". Fra Angelico ne pensait pas autrement, lui qui ne s'abaissa jamais aux sujets profanes, et professait qu'on ne pouvait pas peindre le Christ sans vivre à l'imitation du Christ. En tant que membre de l'ordre des frères prêcheurs, sa prédication se faisait par le pinceau.
Une renommée "internationale"
A partir de 1430 la renommée de Fra Angelico dépassait très largement les frontières de son ordre monastique et aussi Florence.
Il exécuta plusieurs oeuvres imposantes à Florence où les Medicis commençaient à s'imposer, puis à Cortone et Pérouse.
La diffusion de la réputation de Fra Angelico fut sans doute favorisée par l'extension rapide de la mouvance de l'observance au sein de l'ordre dominicain et pour laquelle Fra Angelico avait pris parti dès le début de sa vie religieuse. En effet, en 1435 saint Antonin parvint à y rallier le maître général de l'ordre.
Le couvent Saint Marc à Florence
Depuis longtemps les dominicains de l'observance souhaitaient occuper un couvent à Florence même. Ce fut chose faite en 1436 où le couvent saint Marc, occupé par des Sylvestrins très relâchés, fut attribué aux dominicains de l'observance. Fra Angelico, qui pour lors était à Fiesole, intégra le couvent saint Marc de Florence en 1438. Il fallu moins de 5 ans pour réaliser un colossal travail iconographique de plus de 50 peintures qui décoraient les cellules et lieux communautaires du couvent saint Marc. A l'époque saint Antonin était prieur du couvent. C'est donc dans un esprit vraiment surnaturel que ce travail a été réalisé comme en témoigne actuellement les fresques des cellules, qui imposent le silence et qui poussent au recueillement avec une autorité presque surnaturelle. Ces peintures sont d'un dépouillement extrême, conformes bien sûr à l'idéal de pauvreté monastique, mais qui expriment aussi une intensité spirituelle peu commune. Le peintre voulait éviter tout ce qui pouvait distraire de l'essentiel : la méditation des mystères de l'Incarnation et du Salut.
Un peintre infatigable
Fra Angelico a eu l'occasion d'exercer plusieurs fois des charges dans sa communauté, celle de prieur ou celle d'économe. A cette occasion il manifesta une fidélité sans faille à la stricte observance.
Le couvent de saint Marc devint un couvent de prestige, la vitrine monastique de la magnificence de Florence. Mais ce fut au détriment de l'idéal de pauvreté et le couvent ce mondanisa un peu. Alors Fra Angelico se retira au couvent de Fiesole, mais ce fut pour peu de temps car le pape Eugène IV l'appela à Rome à la fin de l'année 1445 pour deux ans. Ce séjour romain fut extrêmement fécond : il réalisa plusieurs oeuvres pour le couvent de la maison générale et pour le Vatican.
Au printemps 1447 Fra Angelico alla à Orvieto, pour décorer une chapelle où était gardée la célèbre relique d'un miracle eucharistique, qui eut lieu dans cette ville en 1263. Malheureusement il ne put finir son travail.
En 1447 Eugène IV mourut et fut remplacé par Nicolas V, qui demanda d'autres travaux à Fra Angelico.
Les dernières années
Le 10 juin 1450 Fra Angelico était de retour à Fiesole pour prendre la charge de prieur à la place de son frère de sang Benedetto, qui venait de mourir. Deux an après, à la fin de son priorat, il put reprendre son activité de peinture malgré son âge ; il avait plus de 60 ans.
Le 18 février 1455, Fra Angelico rejoint la compagnie des anges en s'éteignant, non pas à Fiesole mais à Rome. A la demande du pape, il reçut une sépulture digne de son génie, privilège rare pour un simple religieux.
Eloge de Fra Angelico
Selon son premier biographe Vasari :
"Il fut d'une profonde humanité, sobre, menant une vie chaste, et échappa ainsi aux pièges du monde. Il disait souvent que pour s'adonner à son art, il fallait une vie calme et sans soucis, et que, si l'on travaillait pour le Christ, il fallait vivre sans cesse près du Christ... Il fut en somme dans ses actions et dans ses paroles toute humilité et toute modestie, et dans sa peinture d'une piété sans complication... Fra Giovanni, dit-on, n'aurait jamais touché ses pinceaux sans avoir auparavant récité une prière."
Pie XII a voulu l'honorer en ouvrant en 1955, l'année du 5ème centenaire de sa mort, la cause de sa béatification. Saint Jean-Paul II lui accorda officiellement, par un motu proprio du 3 octobre 1982, le rang de bienheureux que ses contemporains lui avaient déjà conféré au lendemain de sa mort. En 1984 il en fera aussi le patron universel des artistes.
Dans un autre article nous essaierons de rentrer plus avant dans l'âme de ce bienheureux et la compréhension de ses oeuvres.
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