L'Art en Question 6 : HOLBEIN - Les Ambassadeurs
https://www.youtube.com/watch?v=eqBmn7kMYmU&list=PLA4108FDD770EB66D&index=7&t=0s
Le tableau Les Ambassadeurs de Hans Holbein, peint en 1533, est présenté ici comme une enquête policière. On entre dans le tableau pour en découvrir les secrets et la signification.
Cela fait maintenant deux ans que j’utilise cette vidéo de l’Art en question pour aborder l’art de la Renaissance et les idées humanistes en cinquième, et cela fonctionne. Les élèves suivent le documentaire avec attention et s’exclament devant les découvertes faites.
L’étude du tableau permet de voir la nouvelle place de l’homme par rapport à Dieu, les divisions religieuses, les progrès des arts et des sciences, les Grandes découvertes et de préciser le contexte géopolitique de l’Europe.
A l'image de nombreuses vanités, elle montre, à l'aide de l'anamorphose centrale, deux choses essentielles:
- D'une part, que la mort, qu'on ne peut pas comprendre et qu'on peut difficilement se représenter, est au centre de notre vie, comme elle figure là au centre de la toile. Certes, aucun des personnages de la toile semble n'y prendre garde, semble ne la remarquer, et, de fait, ces deux ambassadeurs sont trop préoccupés des"soucis" de la vie pour tourner leur regard vers elle. Pourtant, quand on regarde le tableau, on ne voit qu'elle, au centre, déformée et donc d'autant plus visble qu'elle est peu reconnaissable. Ce que nous montre Holbein, c'est donc que tous nos diverstissements, toutes nos activités, aussi raffinés et nobles soient-ils, (tels sont ici, l'astronomie, la musique, la géographie, les arts et les techniques issus des sciences), toutes ces activités qui font la grandeur de l'homme convergent vers un seul point qui les réduit à néant : la mort, qui vient rendre tout vain, inutile et sans sens. La richesse et le luxe des ambassadeurs (qui sont ici ambassadeurs de l'humanité avant d'être ambassadeurs des nations) semblent alors ridicules.
Le tableau d'Holbein montre alors comment, quoi que nous fassions, désirions, entreprenions, nous le faisons toujours pour fuir ce que nous ne voulons et ne pouvons voir : le réel et la mort. Car, s'il s'agit là d'une anamorphose, c'est parce que nous ne pouvons pas voir le réel ou la mort tels qu'ils sont, bien que nous ne puissions pas non plus en détourner nos regards.
- D'autre part, ce que nous montre Holbein, de manière plus subtile encore, c'est que seul l'art peut nous montrer ce que nous ne pouvons, ou voulons, précisément pas voir : seul l'art pictural peut proposer la mort à voir, de façon déformée, mais en même temps centrale. La technique même, ici, est idée : ce crâne ne peut être vu que de biais, car personne ne peut voir le réel de face ; ce crâne prend tout le champ de vision, tout en se faisant passer pour secondaire, de même que dans notre existence humaine, nous faisons passer la considération de la mort en dernier, alors même qu'elle est ce vers quoi tout converge et ce dont l'idée ne nous quitte en réalité jamais.
Seul l'art peut donc nous donner à voir ce que jamais nous ne voulons voir. sa vocation est donc, au plus haut point, de nous donner à voir la vérité.
Vous pouvez en lire un descriptif complet et très détaillé ici. (cliquez).http://philosophie-art.over-blog.com/2012/02/les-ambassadeurs-holbein.html
Les Ambassadeurs, HANS HOLBEIN Le Jeune, 1533
Voilà un des chef-d’œuvre de la National Gallery de Londres, grand tableau carré (2x2 mètres), immanquable, peu attractif pourtant à première vue : deux personnages se tiennent immobiles de chaque côté d’un meuble couvert d’objets divers, sans expression, lourds, figés. Au premier plan se détache une forme bizarre et grise.
Society-Political-Science-Holbein-ambassadors.jpg
Il faut alors s’approcher et s’interroger : qui sont ces deux hommes ? Le plus visible, celui de gauche, est Jean de Dinteville, ambassadeur de France nommé par François 1er à londres pour obtenir le soutien de Henri VIII contre l’Empire ; il doit son allure imposante à l’épaisse pelisse doublée d’hermine qu’il porte sur une chemise de soie rouge et à sa médaille de l’Ordre de Saint-Michel ; son manteau est court car il est ambassadeur de « robe courte » (détenteur de pouvoir politique). Il tient un poignard dans sa main droite, sur lequel est inscrit son âge : 29 ans (seulement !).
A l’occasion des Fêtes de Pâques de 1533, il a invité son ami George de Selve à Londres et c’est lors de cette rencontre qu’Holbein, qui a déjà réalisé deux portraits de Jean de Dinteville, a peint cette scène, ou plutôt, cette mise en scène ..
George de Selve a 25 ans ; il est évêque de Lavaur (Tarn) et diplomate : il est donc ambassadeur en « robe longue » (détenteur de pouvoir religieux), et habillé plus sobrement de sombre. Les deux ambassadeurs et amis ne se regardent pas, ils posent sérieusement, imbus de l’importance intellectuelle et sociale qu’ils sont désireux, grâce au décor soigneusement choisi et disposé autour d’eux, de montrer.
Qui sont-ils ? Des érudits, des hommes de la Renaissance, ainsi que l’atteste la présence d’objets qui représentent toutes les matières du « quadrivium » de l’éducation humaniste : le globe céleste et le globe terrestre ( sur lequel on peut lire le nom du château familial de Dinteville , Polisy !), symboles de l’ouverture au monde, une équerre et un livre d’arithmatique ouvert, symboles de la connaissance, un livre de musique et un luth, symbole d’harmonie, mais une corde du luth a sauté. Tiens ! une imperfection ..
Et là, à l’extrême bord gauche du tableau, à moitié caché dans un repli de la tenture verte, n’est-ce pas un crucifix ? Discret, le crucifix…
Ces deux éléments, moins évidents, moins parfaits, pourraient être une allusion au mouvement de la Réforme qui secoue alors l’Eglise, et une référence directe à la mission de l’Ambassadeur George de Selve : maintenir l’Eglise unifiée… oui mais , là, devant nous, il y a aussi cette drôle de chose, que l’on a appelée jusqu’au 20° siècle « l’os de seiche » ; regardez attentivement, en vous positionnant dans l’angle droit du tableau, ou en tenant chez vous une petite cuillère côté convexe : il s’agit d’un crâne, peint selon la technique de l’anamorphose( une projection allongée d’une forme en elle-même).
Un crâne ? Oui, une « vanité », destinée à rappeler que nulle puissance n’égale celle de la mort, que le pouvoir, politique intellectuel ou religieux, ne donne que l’illusion de la jeunesse ( ! rappelons nous leur âge) et de la domination, que la prestance, les étoffes lourdes, le pavage délicat sur lequel on se tient, tout cela n’est que « vanité ».
Au-delà de la technique artistique et de la richese symbolique de l’œuvre, on peut se demander si Holbein le Jeune, en 1533, a délibérément choisi d’ajouter cette tête de mort à son tableau une fois les portraits terminés, ou bien si Jean de Dinteville avait mentionné « l’intrus » dans sa commande.. Nul ne le sait mais l’histoire rapporte que Dinteville, de nature mélancolique, avait adopté la devise « memento mori » (souviens toi de la mort), et cette crainte aurait influencé Holbein. A moins qu’il n’ait souhaité ajouter un symbole de sa propre vision de la vie, une sorte de point d’orgue moral à cet étalage de conquêtes humaines. Vanitas vanitatum, et omnia vanitas.
Anne Bordierhttp://entreleslignes.over-blog.fr/pages/Les_Ambassadeurs_HANS_HOLBEIN_Le_Jeune_1533-321778.html
23May
Les Ambassadeurs français à la cour d'Angleterre.
Publié par M Corfmat Professeur d'Arts Plastiques
Hans HOLBEIN le Jeune (1497 - 1543)
Les Ambassadeurs français à la cour d'Angleterre.1533.
Huile sur panneau. 203 x 209 cm.
Londres, National Gallery.
Hans HOLBEIN le jeune est un peintre et graveur allemand, né à Augsbourg en 1497 et décédé à Londres en 1543. Fils du peintre Hans HOLBEIN l'ancien, il travailla comme aide dans l'atelier de son père. En 1515, sa famille se fixa à Bâle, haut lieu de l'humanisme où il se lia avec Erasme. Il séjourna à Lucerne, en Italie puis en France.
De 1516 à 1526, travaillant pour la haute bourgeoisie commerçante, il réalisa des portraits, compositions religieuses, décorations murales, cartons de vitraux et des gravures. Influençé par Grünewald, son style s'ouvrit aux nouvelles conceptions de la Renaissance italienne.
En 1526, fuyant la Réforme, il partit pour Londres, recommandé par Erasme à Thomas More, dont il fit le portrait et séjourna jusqu'en 1528 en Angleterre où il se fixa définitivement en 1532, laissant sa famille à Bâle.
Cette époque constitua l'apogée de sa carrière. Il éxécuta le projet d'un arc de triomphe pour l'entrée d'Anne Boleyn à Londres et peignit Les Ambassadeurs en 1533.
En 1536, il fut nommé peintre-valet de chambre d'Henri VIII et devint en peu de temps le portraitiste officiel de la cour d'Angleterre, tout en menant une activité très diverse : miniatures, oeuvres décoratives. En 1543, en pleine gloire, il mourut de la peste. Portraitiste de génie, recherchant derrière les apparences les expressions signifiantes des visages, unissant aux traditions gothiques les nouvelles tendances humanistes, il effectua la synthèse des courants artistiques de son époque.
Ce tableau est un chef d'oeuvre, riche par ses allusions historiques, les symboles culturels représentés et sa prouesse technique.
Comme dans la plupart des oeuvres de la Renaissance, ce tableau a un commanditaire (une personne qui commande un tableau à un peintre), qui se trouve être représenté à gauche du tableau. Il a donc fait réaliser ce tableau pour une occasion spéciale. Le personnage de gauche est Jean de Dinteville, ambassadeur de France nommé par François 1er à londres pour obtenir le soutien de Henri VIII contre l’Empire ; il doit son allure imposante à l’épaisse pelisse doublée d’hermine qu’il porte sur une chemise de soie rouge et à sa médaille de l’Ordre de Saint-Michel ; son manteau est court car il est ambassadeur de « robe courte » (détenteur de pouvoir politique). Il tient un poignard dans sa main droite, sur lequel est inscrit son âge : 29 ans (seulement !).
Le personnage de gauche est ambassadeur de France
A l’occasion des Fêtes de Pâques de 1533, il a invité son ami George de Selve à Londres et c’est lors de cette rencontre qu’Holbein, qui a déjà réalisé deux portraits de Jean de Dinteville, a peint cette scène, ou plutôt, cette mise en scène ..
George de Selve (a droite ) a 25 ans ; il est évêque de Lavaur (Tarn) et diplomate : il est donc ambassadeur en « robe longue » (détenteur de pouvoir religieux), et habillé plus sobrement de sombre. Les deux ambassadeurs et amis ne se regardent pas, ils posent sérieusement, imbus de l’importance intellectuelle et sociale qu’ils sont désireux, grâce au décor soigneusement choisi et disposé autour d’eux, de montrer.
Cette œuvre se veut tout d'abord une célébration de la gloire de jeunes français très fortunés, parvenus au sommet de la hiérarchie sociale, érudits et influents. Ils sont représentés presque en taille réelle (le panneau a une hauteur de deux mètres) devant une tenture de damas vert et s'appuient sur une table à deux étages dont la surface supérieure est recouverte d'un tapis.
On notera le contraste saisissant dans les vêtements des deux personnages : Dinteville impose une stature royale et altière dans sa pelisse d'hermine à manches bouffantes sur chemise à crevés de soie rouge et arborant le collier de l'Ordre de Saint-Michel (la plus haute distinction française à l'époque). De Selves affiche au contraire une tenue plus austère et uniforme dans son manteau de brocart brun qui l'enveloppe de la tête aux pieds.
Qui sont-ils ? Des érudits, des hommes de la Renaissance, ainsi que l’atteste la présence d’objets qui représentent toutes les matières du « quadrivium » de l’éducation humaniste :
le globe céleste et le globe terrestre ( sur lequel on peut lire le nom du château familial de Dinteville , Polisy !), symboles de l’ouverture au monde.
Une équerre et un livre d'arithmétique ouvert, symboles de la connaissance,...
un livre de musique et un luth, symbole d’harmonie, mais une corde du luth a sauté. Tiens ! une imperfection ..
Et là, à l’extrême bord gauche du tableau, à moitié caché dans un repli de la tenture verte, n’est-ce pas un crucifix ?
Discret, le crucifix…
Ces deux éléments, moins évidents, moins parfaits, pourraient être une allusion au mouvement de la Réforme qui secoue alors l’Eglise, et une référence directe à la mission de l’Ambassadeur George de Selve : maintenir l’Eglise unifiée…
Le sol:
Le sol est l'élément dont la signification serait la plus mystérieuse, parmi tout les éléments représentés. Mais on pense pouvoir l'identifier grâce à un autre sol qui se trouve à la Chapelle Sixtine, placé en dessous de la célèbre fresque "La création d'Adam" de Michel-Ange. Dans tout les cas, le sol représente un macrocosme, une représentation de l'univers dont le cercle centrale symbolise Dieu et les quatres cercles restants représentent les quatres éléments (Eau, Feu, Terre, Air). Cela pourrait signifier que la vie des deux hommes posés sur le macrocosme (et par extension la vie des hommes en général) dépendent de Dieu.
L'objet déformé qui se trouve au premier plan est parfois appelé l'os de seiche. Au premier abord, on se demande ce qu'un tel élément fait ici et ce qu'il représente.
En vérité l'effet qu'on observe s'appelle une anamorphose. Elle représente un crane qui n'est pas déformé, si on sait le regarder d'un certain point de vue.
L'anamorphose consiste donc à donner l'illusion qu'un élément est déformé, mais cet élément se reconstitue quand on le regarde d'un certain angle ou si on utilise les bons outils. Ici, il faut se placer face au tableau, avancer vers la bordure droite et placer nos yeux à hauteur du visage des personnages.
Puis regarder le crane de biais, les yeux collés tout près de la bordure droite du tableau. Et de façon assez impensable, on remarque que le crane n'est pas déformé, il est même très bien proportionné.
Voici où réside la prouesse technique dans cette oeuvre.
Un crâne ? Oui, une « vanité », destinée à rappeler que nulle puissance n’égale celle de la mort, que le pouvoir, politique intellectuel ou religieux, ne donne que l’illusion de la jeunesse ( ! rappelons nous leur âge) et de la domination, que la prestance, les étoffes lourdes, le pavage délicat sur lequel on se tient, tout cela n’est que « vanité ».
Au-delà de la technique artistique et de la richese symbolique de l’œuvre, on peut se demander si Holbein le Jeune, en 1533, a délibérément choisi d’ajouter cette tête de mort à son tableau une fois les portraits terminés, ou bien si Jean de Dinteville avait mentionné « l’intrus » dans sa commande.. Nul ne le sait mais l’histoire rapporte que Dinteville, de nature mélancolique, avait adopté la devise « memento mori » (souviens toi de la mort), et cette crainte aurait influencé Holbein. A moins qu’il n’ait souhaité ajouter un symbole de sa propre vision de la vie, une sorte de
point d’orgue moral à cet étalage de conquêtes humaines.
Vanitas vanitatum, et omnia vanitas.
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