L’Art gothique.
vendredi 10 avril 2015 par
Sommaire
L’architecture
La peinture
La sculpture
Livres et littérature
Et l’Europe dans tout ça ?
L’architecture
LES CATHEDRALES
- Le renouvellement architectural
Jusqu’à la fin du Xème siècle, les églises sont construites selon le style roman, marqué par la voûte en berceau, des murs épais et de lourds contreforts pour contrebalancer la poussée de la voûte. Les fenêtres sont donc nécessairement d’amplitude modeste, pour ne pas affaiblir l’ensemble de l’édifice.
Voûte gothique
A partir du XIIème siècle, l’élan religieux qui se développe dans toute l’Europe entraîne un désir de renouvellement de cette architecture, avec plus de lumière et d’élévation vers le ciel. C’est en France que naît ce nouveau mouvement, sous le règne de Louis VII : il donne carte blanche à l’abbé Suger pour la reconstruction d’une abbatiale à Saint Denis.
La nef et le choeur
L’originalité de l’abbatiale, c’est le percement de grandes baies en arcs brisés, garnies de vitraux laissant entrer la lumière et éclairant le chœur. Elle est rendue possible par l’utilisation de la voûte sur croisées d’ogives, qui permet d’alléger les murs et de les ouvrir (ce type de voûte était déjà connu dès la fin du Xème siècle mais c’est à Saint Denis qu’il a été véritablement exploité).
Une telle construction, nécessite une consolidation des murs porteurs. Ainsi, les arcs-boutants, utilisés pour les édifices collatéraux dans les églises romanes, deviennent un élément essentiel de l’Art gothique.
Les arcs-boutants sont des arcs, dont la tête vient buter sur le mur de gouttière pour répartir les poussées sur un élément de maçonnerie statique, appelé culée. Les arcs-boutants doivent recueillir à des points précis les poussées des arcs et des voûtes qui les composent. Ils sont surmontés d’un toit en pente, un rampant.
Avec ces vitraux multicolores, que l’on doit aux verriers normands, la lumière est transformée en un flot de couleurs qui se projette sur les bas-côtés, le déambulatoire et les voûtes de la nef. La pierre devient immatérielle, ou plutôt dématérialisée par la lumière.
Les vitraux peuvent également être complétés par des rosaces : la première a été mise en place par Suger sur la façade occidentale de Saint Denis, puis elles ont été largement utilisées comme à la Sainte Chapelle de Paris ou Notre Dame de Chartres.
Scène biblique
Vitraux et rosaces remplacent dès lors les peintures murales de l’époque romane. Comme elles, ils racontent l’Ancien et le Nouveau testament mais, grâce à la lumière, ils rendent vivantes les scènes bibliques.
- La symbolique des couleurs
Pendant tout le Haut Moyen Age, la couleur bleue a été rejetée : on disait que c’était la couleur des Barbares. En fait, on savait fabriquer de beaux rouges mais on ne savait pas fabriquer de beaux bleus.
Pour faire un beau bleu, il faut disposer de lapis-lazulis, donc faire venir les pierres d’Orient, mais aussi savoir les transformer, tout ceci étant très onéreux. Les croisades et les voyages de Marco Polo vont enfin permettre à l’Europe de disposer de la matière première et des techniques nécessaires.
Dans les vitraux, c’est le bleu qui laisse passer la plus belle lumière. Il acquiert ainsi ses lettres de noblesse et devient la couleur de la vierge Marie. Saint Louis (Louis IX) sera le premier roi à se vêtir de bleu…
Cathédrale de Strasbourg.
Malheureusement la technique des verriers du gothique a été perdue et on n’a pas pu remplacer les verrières détruites par les bombardements pendant la seconde guerre mondiale.
- L’extension en Europe
Après Saint Denis (1135) et pendant plus d’un siècle, un grand nombre de nouveaux édifices sont mis en chantier en France. Pour n’en citer que quelques-uns : Rouen (1145), Paris (1163), Strasbourg (1190), Bourges (1192)… L’ancienne cathédrale romane de Reims, dans laquelle Clovis a été baptisé, est reconstruite dans le style gothique en 1211. Vous la voyez ci-dessous avec sa façade colorée, telle qu’elle devait apparaître au Moyen-Age.
Dans le même temps, sous l’influence des Cisterciens et des ordres mendiants, la nouvelle architecture gagne l’Italie (encore que la cathédrale de Milan soit le seul monument religieux vraiment gothique du pays), mais aussi l’Angleterre, de par ses liens avec la Normandie, l’Irlande proche culturellement de la Bretagne.
Westminster.
L’Allemagne, par l’intermédiaire de la Bourgogne, adopte également l’architecture gothique, mais plus tardivement et avec des variantes notables : dans le nord du pays, la pierre fait place à la brique (cathédrale de Lubeck). Dans certains édifices, la nef et les bas-côtés peuvent être de même hauteur : on parle alors de cathédrale-halle, comme la Nikolaikirche de Berlin.
La nef de Nikolaikirche
L’Espagne constitue un cas très particulier, dans la mesure où la péninsule est divisée entre Musulmans et Chrétiens.
La Catalogne et la Navarre, proches de la France, adoptent l’architecture gothique classique.
Plus au sud, dans les provinces restées longtemps sous influence musulmane, les architectes chrétiens associent les techniques gothiques à celles empruntées aux Musulmans. Ils créent ainsi l’art Mudéjar. Les caractéristiques en sont les arcs lobés, les corniches, les voûtes sur arcs entrecroisés. Les murs sont en maçonnerie ou en briques, plus légères que la pierre. Comme les plafonds sont en bois et donc plus légers également, les arcs-boutants ne sont pas nécessaires.
LES CHÂTEAUX FORTS
une architecture qui organise la société médiévale.
Le château fort, du latin castellum, est une structure fortifiée, essentiellement habitée par la noblesse. Ces bâtisses se développent en Europe pendant le Moyen Âge mais on en trouve au Moyen-Orient et en Asie.
Les châteux forts apparaissent en Europe, à la dislocation de l’Empire carolingien. Le territoire a été divisé entre seigneurs et princes rivaux qui cherchent à agrandir leur fief en querellant le voisin, d’où la nécessité de contrôler la défense de la province. Un autre souci s’ajoute à cela, ce sont les invasions scandinaves.
Sur des promontoires qui dominent plaines et vallées, on construit des châteux en pierre, entourés d’un rempart crénelé. les crénaux permettent de voir l’ennemi arriver, sans être vu ; les meurtrières, percées dans les murs ont le même objectif. Autour de ces hautes murailles abruptes, on creuse un fossé, une douve, qu’on remplit d’eau. On penètre dans le château par un pont-levis qui ne s’abaisse que pour le seigneur, sa famille et les visiteurs attendus ou annoncés.
Il possède une chapelle privée, dont les ornements reflètent la richesse du seigneur.
Modèle de château fort
Ces édifices, modifient la société médiévale. Le seigneur, est maitre tout puissant dans son domaine mais il est le vassal du roi. Il doit l’aider en cas de conflits.
Un duc est vassal du roi mais suzerain pour un comte.
Le seigneur a droit de vie ou de mort sur ses sujets, les serfs, mais il leur doit protection en cas d’attaques ou d’épidémies.
Le château fort est un centre administratif, politique, économique. Ses dimensions, son esthétique, sont le symbole de la puissance du seigneur.
L’ARCHITECTURE EN VILLE
Dans la seconde partie du Moyen-Âge, nous l’avons vu dans l’article sur l’économie médiévale de Jean François, les villes se développent. Comme le seigneur montre sa puissance par la beauté de son château, les notables et riches bourgeois en font de même en ville en se faisant construire de magnifiques demeures en pierre, dont l’encadrement des portes et fenêtres est sculpté. A l’angle de certaines rues, on peut admirer des statues en encorbellement qui embellissent les façades.
La parlement de Budapest.
La peinture
LA PEINTURE RELIGIEUSE
L’art du vitrail transfigure l’intérieur des cathédrales et influence la peinture pour son raffinement.
A partir du XIIe siècle, les peintres réalisent de grands tableaux sur bois pour décorer églises et cathédrales. Ils ne sont plus anonymes, les mécènes, rois ou prélats, passent commandes à des peintres nommés, maitre d’un atelier : Jean Pucelle, Jean Malouel, les frères Limbourg, Enguerrand Quarton,Jean Fouquet, Giotto, Cimabue, Fra Angelico, Van Eyck, Martini, Memling...
La Pieta d’Avignon. E. Quarton.
Les premiers mécènes sont le roi et la famille royale pour marquer leur suprématie, le Pape et le haut clergé pour montrer leur puissance.
Ces artistes, dans leur atelier, profitent d’une certaine indépendance qui les autorise à s’exprimer avec plus de liberté.
On peut voir dans une oeuvre, le commanditaire en Joseph ou en roi Mage dans une Nativité, dans une autre oeuvre, l’artiste aura mélangé Art religieux et Mythologie.
LA PEINTURE PROFANE
Les commandes sont à l’initiative des rois qui rivalisent pour faire venir les plus grands peintres à leur cour. Les bourgeois, en plein essor social, veulent montrer leur richesse et à l’instar des rois, de riches dignitaires font faire leur portrait..
Portrait.Van der Weyden.
Les "époux Arnolfini" illustrent la position de cette bourgeoisie montante. Cette toile a un autre intérêt, le miroir. Celui-ci, placé au centre du tableau, sur la ligne de fuite, ouvre une nouvelle dimension de l’espace. Il nous renvoie une partie de la pièce que nous ne pourrions pas voir, il crée une notion d’infini et de vérité. C’est l’oeil.
Les peintres d’Europe occidentale se trouvent liés par un même répertoire et une même position esthétique. La technique du miroir, sortie des ateliers flamands va se répandre dans toute l’Europe et dans le temps puisque les peintres du XXIème siècle y ont encore recours.
- La sculpture
LA SCULPTURE RELIGIEUSE
Comme la sculpture romane, la sculpture gothique est liée à l’architecture, principalement au tympan des églises et cathédrales dans un premier temps.
Les matériaux sont différents, la pierre, bien sûr mais aussi le granit, le calcaire, le marbre et l’albâtre.
Les sculptures représentent le Christ, la vierge Marie, les anges ou les saints, d’après " la légende dorée" de Jacques de Voragine. Les détails sans importance sont travaillés par des apprentis mais le visage et les mains sont sculptés par les maitres. La sculpture gothique religieuse est en ronde-bosse, très détachée du mur tout en restant partie intégrante de l’architecture. Deux école se distinguent : style rémois,très travaillé, comme une orfèvrerie, opposé au style chartrain plus austère.
style rémois
portique de la cathédrale de Reims
De petites sculptures sont en bois peint de différentes couleurs. Ce sont les statues polychromes. Parfois, travail d’orfèvre, elles sont en ivoire.
LA SCULPTURE PROFANE
Elle est essentiellement monumentale, souvent funéraire. Les défunts, grands ou riches de ce monde, sont représentés couchés sur le tombeau, les yeux ouverts ou fermés.
En fait, la pierre ou le marbre est taillé debout, on couche ensuite le couvercle du tombeau. Ce sont les gisants.
Le mobilier est décoré avec des entrelacs et des rinceaux qui rappellent les enluminures.
Livres et littérature
LIVRES ET ENLUMINURES
Dans les monastères, les "scriptoria" dirigées par des moines copistes, participent au développement du livre sur parchemin, avant l’arrivée du papier au XIIIe siècle et de l’imprimerie fin XVe.
Ils copient la Bible, la vie des Saints, des prières, des œuvres de théologie et de philosophie qu’ils décorent de fines enluminures.
livres d’heures.
LA NAISSANCE DE LA LITTÉRATURE EUROPÉENNE
Aux environs du XIIe siècle, le latin, langue unificatrice de l’Empire romain a régressé et les langues vernaculaires ont depuis le serment de Strasbourg (842), petit à petit repris leur place, enrichies par ces siècles de conquêtes diverses. Le serment de Strasbourg, signé entre les petits-fils de Charlemagne est rédigé en latin, en langue romane ou ancien français et en ancien germanique. C’est un événement parce qu’il instaure l’égalité entre ces trois langues. Cependant il faut attendre trois cents ans pour qu’il existe une véritable littérature.
Le latin n’a pas disparu. Il reste la langue administrative et celle de l’église. les prières et les chants lithurgiques sont en latin et le demeureront jusqu’au XXe siècle.
Malgré cette unité d’esprit que semble avoir créé la foi chrétienne, exprimée par l’Art sous toutes ses formes, les guerres sont constantes. L’Angleterre envahit la Normandie et l’Aquitaine, la Lorraine et la Bourgogne sont en conflit, en Espagne, c’est la Reconquête contre les Maures...Ce sont de longues guerres avec de courtes trèves.
Il faut encourager les soldats, leur donner des exemple de bravoure, alors, on crée des héros. Ils ont été de vaillants chevaliers, on fait d’eux une légende.
"La chanson de Roland" a un tel succès que l’Italie invente une enfance et une jeunesse à ce baron breton avec "Orlando furioso". Les Espagnols ont leur "Cid campeador" qui combat les Maures, les Allemands glorifient "Siegfried"...Le roi Arthur et la quête du Graal en Bretagne atteint l’Irlande et le Dannemark. Dans cette oeuvre, le chevalier surpasse sa qualité de vaillant soldat pour atteindre la quête mystique du Graal et servir Dieu. Les premières planches du "Roman de Renart" sont rédigées en Angleterre poursuivies en France....C’est un même courant de pensée qui unifie la littérature européenne.
S’ajoute à cela le rétablissement de la rhétorique d’Aristote.
La poésie en langue romane, germanique ou autre, reçoit ses lettres de noblesse.
Plus n’est besoin de versifier en grec ou en latin pour être reconnu poète.
Les femmes écrivent : Christine de Pisan, Marie de France..
A côté de la poésie épique, la poésie lyrique prend son envol : Charles d’Orleans, Ruteboeuf, Villon, Dante, Pindare...
Peut-on parler du Moyen-Âge sans citer la tapisserie de la Dame à la Licorne dont je ne vous raconterai pas la trop longue histoire ?
Elle comprend six panneaux qui représentent les cinq sens et la philosophie.
Et l’Europe dans tout ça ?
Nous avons vu que l’Europe s’est construite sur la spiritualité de l’Eglise chrétienne, cette même foi a unifié l’art du Moyen-Âge. On parle d’Art français, allemand, italien…à cause de la localisation des cathédrales et des églises mais la conception de l’art est la même dans tous ces pays.
Le désir de se rapprocher de Dieu à travers sa lumière divine que l’on fait entrer dans les églises avec les verrières et les vitraux, la peinture qui raconte des événements de la Bible ou des évangiles.
Cependant, dès le XIIIe siècle, on assiste à la naissance d’un autre sentiment européen .
Les artistes deviennent des maitres, ils ouvrent des ateliers, ils voyagent, ils échangent.
Ils préparent le grand mouvement artistique de la Renaissance.
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